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dimanche, 05 janvier 2020

Le point de vue du général Desportes sur l'Otan

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Le point de vue du général Desportes sur l'Otan
Ex: http://www.europesolidaire.eu
Le général français Vincent Desportes vient de donner pour RT France, son avis sur l'Otan  qui célèbre ses 70 ans cette année, avant de poser la question d'une éventuelle Europe de la défense.

GVD-décider.jpgNous en retenons ici les principaux éléments ici,  car il coïncide parfaitement avec notre propre analyse, exposée dans de nombreux articles. Mais nous allons plus loin que le général Desportes. Si la France voulait récupérer un minimum d'indépendance à l'égard des Etats-Unis, elle devrait quitter l'Otan au plus vite. Charles de Gaulle l'avait compris, qui avait toujours refusé d'entrer dans l'Otan. Mais l'actuel Président de la république française est trop dépendant de Washington, quoiqu'il prétende, pour envisager cette mesure de salubrité. 

La pertinence de l'Otan pour l'Europe.

L'Otan est devenue un protectorat américain dirigé par un allié souvent brutal, parfois méprisant, qui va imposer un certain nombre de conditions commerciales, légales, à ses membres en échange de leur protection.

L''Europe est un continent mature, composé de nations anciennes, qui doit enfin trouver son autonomie stratégique, politique, opérationnelle et capacitaire (au plan des capacités militaires). L'Europe doit être capable d'engager les combats qu'elle a à mener et doit être capable de conduire une politique étrangère qui puisse être différente de celle des Etats-Unis.

L'avenir de l'Europe n'est pas transatlantique, il est eurasiatique

GVD-comprendre.jpgDepuis la chute du mur de Berlin et la dislocation de l'URSS en 1991, l'Otan a perdu sa raison d'être et ses objectifs. Toutefois, même si l'ennemi officiel, aujourd'hui, de l'Otan est le terrorisme, il semblerait qu'elle ait des ennemis officieux, autrement dit la Russie. L'Otan s'étant consolidée dans sa lutte contre l'URSS du pacte de Varsovie, elle revient sans cesse à cet objectif, en tendant à lutter contre la Russie. Il est probable que les tensions qui existent aujourd'hui entre la Russie et l'Otan sont pour une bonne part de la responsabilité de l'Otan et en son sein des Etats-Unis. 

Pourtant, l'avenir de l'Europe n'est pas transatlantique, il est eurasiatique. Il faut donc que l'Europe arrive à vivre dans des conditions raisonnables avec son grand allié, son grand voisin, qui est la Russie. La Russie fait partie de l'Europe, elle a toujours fait partie de l'Europe. Qui plus est la France, en particulier, a toujours eu une relation étroite voire une amitié avec la Russie, même du temps des guerres napoléonienne et de la campagne de Russie . La France et la Russie ont intérêt à bâtir ensemble leur avenir.

L'Europe doit être souveraine, donc elle doit se donner une puissance militaire souveraine.

GVD-tomorrow.jpgCeci signifie la mise en place d'une armée européenne, notamment pour ne plus subir l'extraterritorialité du droit américain et les règles commerciales qui lui sont imposées par Washington. Les pays européens, à cet égard, doivent se réveiller. L'Otan est un marchand de sable qui endort les pays européens en leur disant que les Etats-Unis les protégerons Or aujourd'hui, le parapluie américain n'est plus fiable. Malheureusement l'armée européenne est encore un mirage. L'Europe est encore très loin de créer une armée européenne. Pour que l'Europe soit souveraine et entendue lors de négociations internationales, elle doit posséder une puissance militaire. La France, aujourd'hui, pèse d'avantage que l'Europe parce qu'elle a une puissance militaire et qu'elle peut la déployer., il faut que l'Europe se donne une puissance militaire analogue de manière à pouvoir être entendue.

Référence

https://francais.rt.com/international/69181-vincent-despo...

Washington pourra-t-il obliger l'Ukraine et la Géorgie à entrer dans l'Otan ?

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Washington pourra-t-il obliger l'Ukraine et la Géorgie à entrer dans l'Otan ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Lors d'une réunion de l'Otan à Washington en avril 2019, les membres de l'Organisation, à l'initiative des Etats-Unis, avaient convenu de renforcer leur soutien à l'Ukraine et la Géorgie face à la « menace russe », notamment dans le domaine de la défense maritime et côtière

Il faut rappeler que ces deux pays ne sont pas membres de l'Otan, mais que leur entrée est en discussion depuis l'année 2000.

Dans le même temps, des navires de guerre de l'Otan et de ces deux pays procédaient à des manœuvres communes en Mer Noire. Il suffit de regarder une carte pour se rendre compte que la Russie dont la Mer Noire est le seul débouché en eau tempérée vers le grand large ne pouvait pas être indifférente à ces perspectives.

La Turquie, la Roumanie et la Bulgarie, elles mêmes membres de l'Otan, ont également des frontières maritimes en Mer Noire. La Mer Noire allait-elle devenir une mer presque totalement aux mains des forces navales et aériennes de l'Otan ?

La Russie ne veut pas s'opposer militairement à une volonté de l'Ukraine et de la Géorgie d'entrer dans l'Otan. Cependant il lui reste des cartes à jouer du fait que l'Ukraine est en conflit intérieur avec les « Républiques » du Donbass et qu'il en est de même de la Géorgie laquelle refuse de reconnaître l'indépendance de ses anciens territoires de l'Abkhasie et de l'Ossétie du Sud. Tant que ces conflits ne seront pas résolus, il y a peu de chances que l'Ukraine et la Géorgie acceptent d'entrer dans l'Otan, sachant très bien que les membres européens de l'Otan n'ont aucun désir de provoquer des conflits avec la Russie au sujet de leurs problèmes de frontière.

De plus, il convient de se demander si le nouveau président de l'Ukraine Volodymyr Oleksandrovytch Zelensky, soucieux de normaliser ses relations avec la Russie, accepte aujourd'hui de faire le jeu de Washington à propos de l'Otan.

Beaucoup d'hommes politiques européens, bien qu'atlantistes convaincus, commencent selon le mot de l'un d'eux à se demander si appartenir à l'Otan n'est pas devenu aujourd'hui une « insanity ». Ils voient de plus en plus l'Otan comme un dispositif permettant aux industriels américains de l'armement de continuer à leur vendre des équipements militaires de plus en plus coûteux.

Nicolas Sarkozy avait en le grand tort en 2009 d'organiser le retour de la France dans l'Otan, ce qu'avait toujours refusé en son temps Charles de Gaulle. Il est regrettable aujourd'hui qu'Emmanuel Macron ne remette pas en cause cette décision. Elle est totalement en contradiction avec sa volonté proclamée de mettre en place une armée européenne dotée de ses propres commandements et matériels.

Sur la Géorgie, voir wikipedia

Note au 01/01 20h

On lira ici un jugement du général français Dominique Delawarde sur l'Otan. Il ne le dit pas explicitement, réserve oblige, mais ses propos confirment la teneur de notre article. L'Otan est une nuisance que la France devrait quitter au plus tôt.
https://theduran.com/nato-general-delawarde-assesses-final-london-declaration/?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=the_duran_daily&utm_term=2020-01-01

Tras el asesinato de Soleimani, ¿más cerca de la trampa de Tucídides?

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ANÁLISIS

Tras el asesinato de Soleimani, ¿más cerca de la trampa de Tucídides?

  • Que Irán responderá, no hay duda; el dónde y el cómo, determinará si se tratará de un episodio más en el conflicto o definirá una nueva fase
  • Israel y EEUU nos pueden estar conduciendo a una nueva guerra en una zona vital para los intereses europeos. Para España no se trata de algo ajeno

Tras el asesinato del jefe de la Fuerza Quds, nada será igual ya en Oriente Próximo. Soleimani era un dirigente fundamental del régimen iraní y estaba en el ojo de mira de la CIA y del Mossad desde hace tiempo. La administración norteamericana (Israel siempre estará al lado, cuando no delante), en momentos difíciles para Donald Trump, golpea durísimamente a Irán y agudiza todas las tensiones existentes en la zona. La respuesta de este país no se hará esperar. ¿Habrá escalada? No se puede descartar. Lo que está claro es que EEUU e Israel se arrogan el poder para intervenir en cualquier lugar del mundo para eliminar a sus supuestos enemigos aunque sea violando el derecho internacional y la Carta de las Naciones Unidas. En este caso, se ha asesinado a un destacado militar iraní en Bagdad.

Como es sabido, la invasión de Iraq cambió profundamente el mapa político en esa parte crucial del mundo. EEUU, no solo no sacó ventajas de esa guerra, sino que, en muchos sentidos, la perdió. El conflicto sirio aclaró aún más la correlación de fuerzas existente. Todo se ha movido. Rusia retorna como actor principal en la zona; Turquía gana autonomía y define con mucha claridad sus intereses estratégicos que, como estamos viendo, llegan al conjunto del Mediterráneo, empezando por Libia. Arabia Saudí se convierte progresivamente en una gran potencia militar e interviene en Yemen, en una guerra -hay que subrayarlo- que no está ganando, e Irán refuerza decisivamente su papel en los tres mundos en los que Soleimani se ha movido con pericia: Iraq, Siria y el Líbano.

EEUU e Israel viven una situación interna bastante parecida: bloqueo político y elecciones en el horizonte. Netanyahu, acorralado por la corrupción, se prepara para unas nuevas elecciones; Trump a la espera del impeachment y con unas elecciones menos inciertas que las de su aliado israelita. Ambos necesitados de dar sensación de poder, de fortaleza y de capacidad para matar a sus adversarios, lo que suele favorecer en campaña electoral. El tema, sin embargo, va más allá: el Estado de Israel no está dispuesto a consentir la existencia de una potencia que pueda poner en peligro sus intereses vitales que, como es sabido, son los de toda esa zona. Lleva años intentando intervenir en Irán. Una operación de este calibre difícilmente se podría hacer sin su colaboración y ayuda logística. Hay que insistir, como señalaron Mearsheimer y Walt, que Israel es un actor interno en EEUU, es decir, tiene tal influencia y poder en sus instituciones, que es capaz de determinar, en muchos sentidos, la política que hacen las distintas administraciones norteamericanas.

Que Irán responderá, no hay duda; el dónde y el cómo, determinará si se tratará de un episodio más en el conflicto o definirá una nueva fase donde la guerra de alta intensidad volverá a aparecer en la zona. La situación es propicia para los que quieren resolver, de una vez por todas, la cuestión iraní y terminar con el régimen de los ayatolás. Israel está en ello. La reacción de Rusia y Turquía tampoco se hará esperar mientras la guerra sigue tanto en Siria como en Yemen.

Hace unas semanas, el presidente Macron hablaba de que la OTAN estaba en muerte cerebral y planteaba pasar página, retomando una nueva política de defensa y de seguridad para una Europa más soberana. Merkel y Trump respondieron afirmando la necesidad de la OTAN en momentos de cambios geopolíticos profundos. Si alguna vez la UE fuese capaz de definir sus intereses estratégicos reales en el Mediterráneo y, específicamente, en el Oriente Próximo, tomaría nota de que Israel y EEUU nos pueden estar conduciendo a una nueva guerra en una zona vital para los intereses europeos. Para España no se trata de algo ajeno. Por lo pronto, la administración Trump plantea reforzar su presencia en Rota y no sabemos con precisión si también en Morón. El nuevo gobierno pronto deberá definir su posición.

vendredi, 03 janvier 2020

Bilan européen 2019

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Bilan européen 2019

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Des élections européennes renforçant le Système.

Les élections parlementaires européennes de 2019 auraient pu être l’occasion d’un choc salutaire au niveau de l’actuelle Union Européenne. Il n’en a rien été. Aucun parti national, aucune coalition de partis nationaux non plus, n’ont pu bouleverser l’équilibre instauré depuis 1979, avec la domination des deux grands pôles de droite (PPE) et de gauche (S&D) qui se répartissent les postes principaux.

La grande vague populiste annoncé n’a pas été au rendez-vous. Si la Lega de Salvini et les « Démocrates suédois » progressent nettement, le FPÖ suite au scandale lié à son désormais ex-dirigeant Hans-Christian Strache s’est effondré. Le RN de Marine Le Pen réalise 23% contre 27% en 2014, même s’il reste à un point près premier devant « En marche ». Le Brexit Party obtient un score important, à plus de 27% des voix, dans un contexte lié au brexit, mais qui reste au même niveau qu’UKIP en 2014. En Finlande et au Danemark, la droite nationale recule fortement, et en Espagne Vox a fait une contre-performance aux élections européennes. La « vague populiste » a donc été une vaguelette.

Certes, il y a toujours des surprises à toutes les élections européennes et un jour viendra je l’espère où le Parti des Européens, que j’ai l’honneur de diriger, sera cette surprise. Ce fut celle des écologistes de gauche, dans un contexte médiatique favorable avec la promotion artificielle de Greta Thunberg. 12% au Royaume-Uni (+ 5 points), 20,5% et 21 sièges en Allemagne, 20% des voix en Wallonie pour Ecolo et 12,4% des voix en Flandre, 13,5% des voix en France. Cette vague verte, certes limitée mais constatée dans presque tous les pays de l’UE, n’était pas attendue mais elle n’est pas si surprenante considérant l’importance du thème écologique, détourné par la gauche.

A l’issue de ces élections, c’est logiquement Manfred Weber qui aurait dû être proposé à la tête de la commission européenne, puisqu’il était la tête de liste du PPE, premier parti du parlement. Pourtant c’est Ursula von der Leyen, ancienne ministre CDU de la défense du gouvernement Merkel, qui a été proposée, à l’issue d’une négociation franco-allemande où Christine Lagarde, soutenue par Macron, a été nommée à la BCE. Pour gêner Matteo Salvini, le parlement européen s’est doté d’un président issu du Parti Démocrate italien et donc très hostile à la Lega, en la personne de David Sassoli.

Quant à la présidence de l’Union Européenne, poste honorifique généralement confié à un homme politique en fin de carrière ou rejeté dans son pays, afin qu’il ne fasse aucune ombre aux dirigeants des gouvernements nationaux, Donald Tusk a été remplacé par le belge Charles Michel, dont le gouvernement était tombé quelques mois auparavant dans son pays. Enfin le haut représentant en matière d’affaires étrangères est le socialiste espagnol Josep Borrell. La gauche, pourtant en net recul, a été finalement bien récompensée.

Ursula_von_der_Leyen_by_Sandro_Halank.jpgL’élection d’Ursula von der Leyen à la tête de la commission européenne fut compliquée. De nombreux partis politiques et groupes lui étaient hostiles. Avec 383 voix, elle a été élue de justesse (il lui fallait 374 voix au minimum). Son désaveu aurait été utile pour la démocratie européenne et on aurait pu espérer un sursaut des parlementaires, même si la personne qui aurait été élue à sa place aurait pu être pire. C’était d’ailleurs la crainte de Viktor Orban. Finalement Ursula von der Leyen fut sauvée grâce au vote du Fidesz d’Orban, du M5S italien et du PiS polonais. Le peu de courage des partis au pouvoir du groupe de Visegrad est assez révélateur.

Autres sujets européens (en vrac).

Russie-Ukraine.

Aucune évolution favorable de la situation entre l’Ukraine et la Russie malgré l’élection d’un nouveau président ukrainien, Zelensky. Les sanctions économiques contre la Russie ont été maintenues par les USA et l’Union Européenne. La Russie est même exclue du sport international, ses athlètes devant désormais se présenter en compétition sans leurs couleurs. Enfin, ces derniers jours, une querelle historiographique oppose durement Poutine et la Pologne à propos de l’attitude ambigüe qu’aurait eu cette dernière vis-à-vis de l’Allemagne hitlérienne, dont pourtant elle fut par la suite l’une des principales victimes. Malheureusement, la Russie semble toujours davantage s’éloigne de l’Union Européenne, par la faute de cette dernière qui n’a pas voulu ou su trouver les mots de réconciliation et a été incapable en 2019 de s’émanciper des USA.

Balkans.

Douche froide pour les espérances d’adhésion des Balkans de l’ouest. Le président français Macron a clairement gelé tout processus dont l’Albanie et la Macédoine auraient pu bénéficier, malgré les efforts de la Macédoine pour calmer le jeu avec la Grèce, en prenant désormais le nom de Macédoine du Nord. Quant à la Serbie et au Monténégro, le processus d’adhésion n’est pas gelé mais ne semble guère évoluer. Ce mépris de peuples européens, qui ont une vocation naturelle à nous rejoindre, est choquant de la part d’un prétendu pro-européen. Par ailleurs, même s’il est au point mort de manière probablement définitive, le processus d’adhésion de la Turquie à l’UE n’a toujours pas été officiellement abandonné.

Allemagne et Autriche.

Malgré la progression de l’AfD dans les différents Länder, et sa forte représentation au Bundestag, le gouvernement Merkel est toujours en place et les Grünen (Verts) ont le vent en poupe. Il se dit que la CDU pourrait choisir de s’allier avec eux, malgré leur tropisme de gauche et leurs positions sociétales très décadentistes. La preuve par l’Autriche, où le conservateur Sebastian Kurz (ÖVP) propose une coalition avec les équivalents écologistes autrichiens, au détriment du FPÖ populiste, fragilisé par le scandale plus ou moins artificiel Strache, sortant opportunément à une semaine des élections européennes.

Sebastian Kurz, qui aux yeux de la droite nationale était devenu une référence, a montré son visage opportuniste, et après s’être allié avec un parti anti-immigration s’allie avec un parti qui y est favorable.

Italie.

Pas d’élections en vue pour Salvini. Le très médiatique dirigeant de la Lega, connu pour sa volonté d’empêcher les bâteaux de migrants de débarquer en Italie, succès médiatique cachant néanmoins un bilan contrasté, a mis fin à la coalition au pouvoir avec le M5S. Ce dernier, qui va en payer le prix dans les urnes, a alors retourné sa veste, plutôt que de soutenir de nouvelles élections, comme le souhaitait Salvini, en s’alliant avec le Parti Démocrate que le M5S dénonçait durement auparavant. Cet opportunisme sera puni et l’est déjà dans les différences élections provinciales.

Dans les sondages, la coalition de droite Lega/Fratelli d’Italia/Forza Italia dépasse désormais les 50%, et à côté de Salvini naît un phénomène Giorgia Meloni, la dirigeante de Fratelli d’Italia, que les sondages placent parfois à 12%.

Espagne.

Les socialistes minoritaires autour de Sanchez restent au pouvoir et préparent une alliance avec Podemos, la gauche radicale pourtant en recul. Symboliquement, Sanchez a fait déplacer la sépulture de Franco, réveillant les blessures de la guerre civile, et ce dans un contexte où Vox, parti national espagnol très hostile au séparatisme catalan, progresse avec autour de 15% des voix dans les différents sondages. La chute de Sanchez serait une excellente nouvelle, tout comme celle du nouveau gouvernement Conte en Italie d’ailleurs.

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Brexit.

Annoncé désormais pour la fin janvier 2020 à l’issue d’une élection parlementaire anticipée où le conservateur baroque Boris Johnson a enfin obtenu une majorité. S’ouvriront ensuite des mois voire des années de négociation dossier par dossier entre l’UE et le Royaume-Uni, mais sur le plan symbolique il ne fera plus partie de l’Union Européenne dans un petit mois. Johnson a obtenu in extremis de l’UE un « soft brexit » qui lui a permis d’organiser ces élections en bénéficiant aussi du rejet du candidat du Labour, Jeremy Corbyn, très contesté. Le Brexit Party, qui dénonçait l’accord comme celui d’un « faux brexit » a choisi de se sacrifier afin de faire gagner Johnson. Farage (UKIP) pourra donc retourner aux USA (comme en 2016) et bénéficiera sans doute, le comble pour un eurosceptique, d’une retraite de député européen d’une UE qu’il aura combattue et dont il se félicite que son pays le quitte.

En matière d’immigration post-coloniale issue de l’ancien empire, la situation restera inchangée ou s’aggravera. Ce brexit identitaire finira bien en brexit hyper-globaliste. Et ce « soft brexit » a rassuré les marchés internationaux.

Ailleurs en Europe.

En Grèce, Tsipras a été dégagé par la Nouvelle Démocratie en pleine renaissance. La droite radicale, divisée en deux formations rivales, résiste. Le procès contre l’une d’entre elles d’ailleurs est en train de tourner vers l’acquittement des mis en examen.

Au Portugal, une petite formation populiste (« Chega » pour dire « Assez ! ») a réussi à entrer au parlement mais avec 1,3% des voix. Dans le dernier sondage, il est crédité d’environ 3% des voix en cas d’élection anticipée.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

Vers un brexit hyper-globaliste ?

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Vers un brexit hyper-globaliste ?

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Finalement, après trois ans de tergiversations, le brexit aura finalement lieu à la fin du mois de janvier 2020 sous la conduite de Boris Johnson, premier ministre sortant réélu triomphalement grâce à un mode de scrutin favorable à la tête du pays.

Winston Churchill en 1946 estimait que le slogan envisagé par les conservateurs de « Keep Britain white » (« conserver la Grande-Bretagne blanche ») était un bon slogan. Depuis Labour et Tories n’auront pas cessé d’ouvrir les portes du pays aux flux venus de l’ancien empire colonial pour que la Grande Bretagne le soit de moins en moins, et dès 1948 en changeant le code de la nationalité afin de faciliter les naturalisations. Mosley et Powell mirent en garde les Britanniques contre ce « changement de peuple » mais ne furent pas écoutés, tout comme Robinson ne l’est pas aujourd’hui, au prix même de sa liberté.

L’adhésion du Royaume-Uni à la CEE, qui allait ensuite devenir l’Union Européenne, fut complexe. C’est finalement en 1974, après le départ de De Gaulle qui s’opposait à son adhésion en 1969, qu’elle rejoint cette organisation en même temps que le Danemark et l’Irlande. Depuis cette époque, elle n’a jamais vraiment joué le jeu, Thatcher obtenant dès les années 80 de nombreux accommodements. C’est ainsi que le Royaume-Uni d’avant brexit n’avait pas l’euro et n’était même pas dans l’espace Schengen. Cela n’a jamais empêché la presse britannique depuis des décennies de taper sur l’Union Européenne et de l’accuser de tous les maux, alors même que les émeutes de 2010 ou le scandale de Rotherham ne lui doivent rien, mais doivent tout à la politique migratoire des gouvernements britanniques de gauche comme de droite.

Pris en otage depuis plusieurs années par l’aile fanatiquement eurosceptique des Tories et menacé dans sa réélection si ce courant renforçait le mouvement UKIP de Nigel Farage qui, en divisant la droite, pouvait faire gagner le Labour, David Cameron était résolu à marginaliser cette aile à l’issue d’un vote national. Pour ce faire, il prétendit renégocier un meilleur accord avec l’UE, comme Thatcher l’avait fait avant lui, et de le soumettre à un référendum, ce qu’elle s’était bien gardé de faire. Il affirma ensuite avoir obtenu des résultats mais personne n’est vraiment capable de dire ce qu’il avait obtenu. Il organisa donc un vote qu’il était persuadé de gagner.

Dans le camp du brexit, on retrouva naturellement Nigel Farage, à la tête de UKIP puis du Brexit Party lorsqu’il quitta le premier en l’accusant de dérives identitaires et d’islamophobie. Mais c’est Boris Johnson, conservateur et ancien maire de Londres, qui se présenta en champion du brexit, avec une bonne dose d’opportunisme et sur la base d’un pari politique audacieux, le même que Fabius en 2005 en France lorsqu’il appela à voter non au TCE mais avec le succès en plus. A grands coups de démagogie, en promettant tout et son contraire, y compris la préférence non-européenne dans les banlieues à forte composante indo-pakistanaise au détriment des Polonais, sans grand résultat malgré tout, et avec l’aide d’une presse efficace pour les relayer, le camp du brexit s'imposa et Cameron, perdant, dut démissionner et se faire oublier.

Il est vrai que le Labour avait fait une campagne a minima, l’attachement d’un Corbyn à l’UE étant quasi nul, et que Sadiq Khan, opposé au brexit, envoyait par hétérotélie un message globaliste à un électoral ouvrier britannique hostile.

De nombreux britanniques, mais pas tant que ça (51,6% d’entre eux), ont choisi l’aventure du brexit au maintien dans une Union Européenne dont personne n’avait été capable de démontrer les bienfaits et alors même que les dirigeants de l’actuelle UE se complaisent dans un globalisme béat. Il est évident que ce vote en faveur du brexit a exprimé une angoisse identitaire légitime, un refus clair du globalisme, et aussi de l’immigration, européenne comme non-européenne, une confusion salement entretenue par les eurosceptiques d’ailleurs.

Et donc le brexit ayant été voté, et même si un référendum au Royaume-Uni n’a pas force de loi, personne n’a osé braver l’interdit de ne pas en tenir compte et les Libéraux Démocrates qui firent campagne en décembre 2019 pour révoquer l’article 50 auront plus choqué que convaincu.

Une fois le brexit voté, sachant que personne n’avait été capable et pour cause d’expliquer ce qu’il serait, la peur d’un brexit dur (« hard brexit ») inquiéta les milieux d’affaires. Après plus de deux ans pendant lesquels Teresa May fut incapable d’obtenir une majorité en faveur d’un accord obtenu auprès de l’UE, Boris Johnson devint enfin premier ministre et s’engagea à un brexit coûte que coûte. Son bluff aurait pu lui coûter cher car le parlement l’avait contraint à demander une prolongation du délai en cas d’absence d’accord. Et il aurait alors dû sans doute démissionner et aurait été fragilisé médiatiquement. Mais l’Union Européenne, sous la pression du gouvernement français, Macron ayant annoncé qu’il voulait que le Royaume-Uni se décide enfin, offrit un accord au rabais au dernier moment à Johnson, qui s'en saisit.

Ce dernier put donc en position de force, avec une opinion lassée, se présenter devant les électeurs britanniques le 12 décembre 2019. Le pays reste coupé en deux (48% des Britanniques ont voté pour les conservateurs) et le Brexit Party a disparu. Alors même que Nigel Farage avait dénoncé un faux brexit obtenu par Johnson, son parti stratégiquement se plaça en soutien de ce dernier, gênant le Labour dans des circonscriptions décisives. Pour Farage, mieux valait un « very soft brexit » à pas de brexit du tout, même s’il ne devait être que nominal. C’est là qu’on constate ce qu’il fallait penser de ses convictions. On ne sera pas non plus étonné d’avoir vu Donald Trump participer à sa façon à l’élection en apportant son soutien à Johnson, en tapant sur l’Union Européenne et en promettant des accords juteux en cas de brexit effectif, une ingérence dénoncée mollement et en vain par l’opposition.

Et maintenant ? Johnson a plus ou moins promis de régulariser 500 000 clandestins présents depuis plus de cinq ans au Royaume-Uni. Celui qu’une certaine droite présente comme un patriote, ce qui a amené Robinson à rejoindre récemment les Tories, mais que même Rivarol ose qualifier de « globaliste », n’est évidemment qu’un remarquable opportuniste qui a réussi à devenir premier ministre en faisant un pari gagnant. Il n’est pas sans talent mais il ne sauvera pas le Royaume-Uni sur le plan identitaire. Lui qui se présente comme un nouveau Churchill a trahi bien sûr le souhait que ce dernier avait exprimé et que j’ai évoqué au tout début de cet article. Les flux intra-européens vont se réduire en raison des tracasseries administratives, tandis que les flux post-coloniaux se renforceront.

C’est bien à un brexit globaliste que nous allons assister, et l’indépendance prétendue ne sera qu’un renforcement de la vassalité atlantiste. Certes sur le plan économique, ce sera un brexit très mou et surtout symbolique. Il ne devrait donc pas y avoir de conséquences dramatiques et d’ailleurs la presse européenne ne semble plus du tout inquiète, surtout qu’un accord véritable de mise en œuvre mettra plusieurs années à voir le jour. Les électeurs voulaient une identité britannique restaurée et ils auront une aliénation renforcée.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

lundi, 30 décembre 2019

Le royaume déglingué

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Le royaume déglingué

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Les élections législatives anticipées de ce 12 décembre marquent un tournant majeur dans l’histoire du Royaume-Uni. Offrant volontiers aux médiats et à ses détracteurs une image de bouffon provocateur, le Premier ministre Boris Johnson, excellemment conseillé par le redoutable stratège en communication politique, Dominic Cummings, a réussi son pari et bénéficie désormais d’une légitimité incontestable sortie des urnes après avoir conquis à la hussarde le vieux Parti conservateur.

Celui-ci connaît pour la circonstance son plus grand succès depuis 1987. Il s’empare de quarante-huit nouvelles circonscriptions dont de nombreuses issues du « Mur rouge » du Nord de l’Angleterre traditionnellement acquises aux travaillistes. « BoJo » dispose dorénavant d’une écrasante majorité absolue (365 sièges sur 650). Il va pouvoir réaliser le Brexit, mais va-t-il aussi transformer la Grande-Bretagne en une copie occidentalisée d’un Singapour mondialisé ? Pas forcément quand on sait que les nouveaux électeurs « bleus » sont d’anciens travaillistes Brexiters tout autant préoccupés par l’insécurité galopante que par une immigration croissante, y compris venue du Commonwealth.

Ce scrutin fait trois victimes principales sans compter les frondeurs conservateurs anti-Johnson qui subissent de graves revers. En 2017, le Labour du sympathique Jeremy Corbyn dont les idées politiques, sociales et économiques n’ont jamais varié, avait augmenté son audience de trente élus. Cette fois-ci, malgré un programme ouvertement populiste de gauche malheureusement entaché par de néfastes considérations multiculturalistes et sociétalistes, les travaillistes perdent le double dont des bastions historiques jugés imprenables. Cette incontestable défaite attise les règlements de comptes entre l’aile gauche dirigeante et son opposition sociale-libérale d’origine blairiste. Les semaines à venir seront saignantes pour ce parti de gauche qui, à l’instar de ses homologues allemand, français, belge et autrichien, poursuit son inexorable déclin.

Europhiles convaincus et favorables à l’arrêt immédiat du Brexit sans même recourir à un nouveau référendum, les centristes libéraux-démocrates se ramassent une belle déculotté et régressent d’un siège, celui de leur présidente, l’Écossaise Jo Swinson. Soutenus par les milieux d’affaires de la City, les « Lib-Dem » n’ont pas convaincu, ce qui est une bonne nouvelle. L’Ulster connaît à son tour une révolution silencieuse. Force d’appoint indispensable aux précédents gouvernements minoritaires tories, les unionistes du DUP reculent de deux sièges et n’envoient plus que huit élus. On observe pour la première fois que le Sinn Fein, le Parti social-démocrate et travailliste et les centristes du Parti de l’Alliance s’adjugent les dix autres sièges. Ce vote confirme la montée en puissance de la population catholique. L’Irlande du Nord risque de devenir un point d’achoppement sérieux dans les prochaines années, parallèlement au retour de la brûlante question écossaise.

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Avec 48 sièges, le SNP ne renouvelle pas son triomphe de 2015 (56 sièges alors), mais le parti indépendantiste gagne néanmoins treize élus supplémentaires. Force prépondérante au-delà du Mur d’Hadrien, il constitue plus que jamais le troisième groupe parlementaire de Westminster. En Écosse, les tories arrivent en tête dans six circonscriptions, les « Lib-Dem » dans quatre et un seul élu pour le Labour longtemps hégémonique. Le regain de l’indépendantisme écossais qui coïncide avec le maintien de l’autonomisme gallois (le Plaid Cymru conserve ses quatre sièges) répond à la nette anglicisation du Parti conservateur. En phagocytant les formations nationalistes (le Parti du Brexit de Nigel Farage fait 2 %, UKIP 0,1 % et le BNP 0,0 %), les conservateurs portent le mécontentement de l’opinion publique anglaise tandis que les formations régionalistes anglaises telles que le Parti du Yorkshire, les Indépendants d’Ashfield ou le Parti pour les Cornouailles ne récoltent que des miettes inférieures à 0,1 % des suffrages. L’« Angleterre périphérique » rurale et sub-urbaine s’élève contre les différentes dévolutions (autonomies administratives) octroyées à l’Écosse, au Pays de Galles, à l’Irlande du Nord et à Londres. Elle réclame sa propre dévolution régionale et se détourne d’une capitale plus que jamais fief d’un travaillisme cosmopolite et globalitaire. Le Parti conservateur correspond donc de facto à la partie visible d’un puissant mouvement de fond nationaliste anglais pan-britannique.

Boris Johnson se retrouve donc à la tête d’un État en proie à des forces centrifuges réelles et tangibles. Loin d’atténuer les tensions territoriales, le Brexit va les accentuer au moment où le garant séculaire de l’unité, la monarchie, traverse une période difficile. Bon pied bon œil, Sa Gracieuse Majesté va néanmoins sur ses 94 ans. Son fils, le prince de Galles, assure dans les faits la régence alors que la famille royale affronte deux secousses comparables au décès de Lady Di. D’une part, le fils préféré de la souveraine, Andrew, grand pote du financier pédophile Jeffrey Epstein, a montré toute sa désinvolture au cours d’un entretien télévisé sur un sujet sensible pour des Britanniques déjà horrifiés par les scandales parlementaires et l’impunité manifeste du prédateur sexuel Jimmy Savile. D’autre part, le jeune couple princier Meghan et Harry envisagerait de s’installer outre-Atlantique, ce qui constituerait un véritable affront pour la « Firme » de Buckingham Palace.

Pour l’heure, bien que fragmentée, l’unité britannique perdure par déférence envers la reine Elizabeth II. Or sitôt celle-ci disparue, son successeur ne fera pas autant l’unanimité, bien au contraire. Telle une autre Autriche – Hongrie, le Royaume-Uni de Charles, voire de Guillaume, pourrait éventuellement exploser.

Bonjour chez vous, et passez de très bonnes fêtes !

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 153, mise en ligne sur TV Libertés, le 23 décembre 2019.

vendredi, 27 décembre 2019

Nouvelle menace américaine sur la souveraineté européenne

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Nouvelle menace américaine sur la souveraineté européenne

Par Pascal Boniface (revue de presse : pascalboniface.com – 23/12/19)*

Ex: http://www.france-irak-actualite.com

Le président Donald Trump vient de prendre un décret présidentiel appelant à geler les avoirs des compagnies engagées dans la construction du pipeline Nord Stream 2 permettant d’exporter du gaz russe en Europe via la mer Baltique. Il s’agit donc, de la part des États-Unis, de menaces de sanctions lourdes à l’encontre de sociétés non américaines, pour des opérations menées en dehors du territoire américain. C’est tout le « charme » du caractère extraterritorial de la législation américaine : une loi décidée en fonction des intérêts américains peut avoir des effets à l’échelle mondiale.

Aussitôt, la compagnie suisse Allseas stoppait ses travaux et l’avenir du gazoduc semblait compromis. L’ensemble des sociétés de taille à être investies sur ce chantier ont des activités aux États-Unis et la crainte de sanctions les tétanise donc. Deux sénateurs américains, Ted Cruz et Ron Johnson, avaient averti le PDG d’Allseas d’arrêter immédiatement et de laisser le pipeline inachevé, l’alarmant que si l’entreprise essayait de façon insensée de le terminer, il prendrait le risque de mettre sa compagnie en faillite.

La dollarisation de l’économie internationale et l’affirmation de la législation extraterritoriale des États-Unis rendent crédible cette menace. Bien avant l’élection Donald Trump, de nombreuses compagnies européennes ont été condamnées à de lourdes amendes, avoisinant au bas mot, sur les 10 dernières années, 40 milliards de dollars. On se rappelle que la BNP (sous le mandat de Barack Obama) avait été condamnée à une amende de 9 milliards de dollars pour être intervenue au Soudan et en Iran.

Cette décision est motivée en apparence par la volonté de ne pas renforcer la Russie coupable d’avoir annexé la Crimée. La Russie, qui dépend toujours aux 2/3 de l’exportation de matières premières énergétiques pour se procurer des devises, en est en effet la première victime. Mais l’Allemagne, qui devait recevoir principalement ce gaz, est également impactée. La chancelière Merkel a dénoncé une interférence dans les affaires intérieures allemandes. Mais ira-t-elle au-delà de cette protestation verbale ?

Le pipeline Nord Stream 2 évite stratégiquement les pays baltes, la Pologne et l’Ukraine, pays très proaméricain. L’ambassadeur américain en Allemagne n’a pas hésité à présenter cette mesure comme pro-européenne, puisqu’il s’agit de refléter les inquiétudes de ces pays. Derrière cette décision se cache surtout une volonté américaine de pouvoir plus facilement exporter son pétrole et son gaz de schiste, pourtant plus cher que le gaz russe.

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Les États-Unis utilisent donc la menace de sanctions pour faire avancer leurs intérêts économiques. Et surtout pour imposer leurs décisions et priver les autres pays, aussi bien rivaux qu’alliés, de pouvoir prendre souverainement les leurs. Après l’interdiction d’acheter du pétrole à l’Iran, les menaces par rapport aux investissements à Cuba, c’est une nouvelle atteinte fondamentale à la souveraineté des pays européens. Il y a une très grande contradiction entre le fait d’appartenir à la même alliance et d’être aussi peu considérés par le leader du principal pays de l’alliance. Aucun pays ne porte plus atteinte à la souveraineté des pays européens que leur allié américain aujourd’hui. Combien de temps les pays européens vont-ils accepter cela ?

Les Américains reprennent en fait à leur compte le principe de « souveraineté limitée », forgé par Brejnev en 1968 à propos de la Tchécoslovaquie en particulier, et des pays du Pacte de Varsovie en général. Emmanuel Macron avait déclaré que l’OTAN était atteinte de « mort cérébrale ». C’était en fait une vision optimiste. L’OTAN est toujours bel et bien vivante, voire même très contraignante, mais elle ne joue plus le rôle de protecteur par les États-Unis des Européens. Elle joue le rôle de castrateur stratégique des ambitions européennes. Il est vraiment temps pour les Européens de sortir du somnambulisme stratégique qui les conduit à ne pas s’opposer aux Américains en échange d’une protection face à une menace hier soviétique réellement existante, aujourd’hui russe, gonflée artificiellement, pour maintenir leur imperium sur les Européens.

Pascal Boniface est politologue, fondateur et directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS)

*Source : pascalboniface.com

mardi, 24 décembre 2019

Sanctions américaines contre le gaz russe pour l’Europe

Vous pourrez voir et apprendre deux choses dans cet article de l’agence russe sputnik. D’abord que les Américains sont en guerre « économique » contre les gazoducs que la Russie tente de construire pour alimenter l’Europe.

La raison est simple. C’est une bataille pour l’énergie. Et l’Europe est un marché pour les gaz des schistes américains. Logiquement pour livrer le gaz américain, qui est plus cher, il faut faire en sorte de le rendre « rentable »… pour cela rien de mieux que de mettre des bâtons dans les roues de la Russie et la mettre dans l’impossibilité de livrer. Ils sont aimables nos amis les « zaméricains » surtout si on leur obéit bien.

Et justement à propos d’obéissance, cela nous amène à la deuxième chose que vous allez apprendre, ou ré-apprendre car vous avez déjà du croiser cette information, à savoir que le budget de la Défense pour l’année fiscale 2020, a éré voté par le Sénat américain au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros) !!

Oui je ne vous cache pas que si l’on utilisait qu’une seule année budgétaire de la défense américaine, il y aurait de quoi développer l’Afrique ou éradiquer la faim dans le monde, mais jouer avec des porte-avions c’est nettement plus rigolo, de même que bombarder à droite ou à gauche.

Cela en fait des sous n’est-ce pas !

Charles SANNAT

« Ceci est un article « presslib » et sans droit voisin, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Insolentiae.com est le site sur lequel Charles Sannat s’exprime quotidiennement et livre un décryptage impertinent et sans concession de l’actualité économique. Merci de visiter mon site. Vous pouvez vous abonner gratuitement à la lettre d’information quotidienne sur www.insolentiae.com. »

«Le meilleur cadeau de Noël»: la société gazière ukrainienne se réjouit des sanctions US contre Nord Stream 2

Les nouvelles sanctions américaines contre les gazoducs Nord Stream 2 et Turkish Stream sont entrées en vigueur, et la compagnie suisse Allseas, engagée par le russe Gazprom, a suspendu ses travaux. Le PDG de la société gazière ukrainienne Naftogaz, Andreï Kobolev, s’en est félicité sur sa page Facebook.

Donald Trump a signé vendredi 20 décembre un décret promulguant la loi sur le budget Défense pour l’année fiscale 2020, texte qui comprend l’instauration de sanctions contre les entreprises associées à la construction du gazoduc Nord Stream 2. Engagée par le russe Gazprom, la société suisse Allseas a déclaré avoir suspendu ses travaux, dans l’attente d’explications de la part de Washington sur la mise en application des sanctions évoquées.

«C’est le meilleur cadeau de Noël pour nous tous», a écrit sur sa page Facebook Andreï Kobolev, PDG de Naftogaz Ukrainy, en y ajoutant des captures d’écran de la signature par le Président des États-Unis du budget Défense américain 2020 ainsi que du communiqué d’Allseas.
Sanctions contre Nord Stream 2 et aide militaire à l’Ukraine vont de pair?
Le 17 décembre, le Sénat américain avait voté le budget Défense pour l’année fiscale 2020, au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros). Les sanctions contre le gazoduc Nord Stream 2 et une aide militaire à l’Ukraine font partie des sommes prévues.

Le gouvernement allemand s’est élevé contre les sanctions américaines visant Nord Stream 2, tout comme la France

Source Agence russe Sputnik.com ici

La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

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La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

par Manlio Dinucci

Ex: http://www.zejournal.mobi

 
 

Après avoir interdit de laisser le Chinois Huawei concourir aux appels d’offres pour la 5G, les États-Unis interdisent aux Européens d’accroitre leur approvisionnement en gaz russe. Si la première décision visait à maintenir la cohérence de l’Otan, la seconde ressort non pas d’une russophobie, mais de la « doctrine Wolfowitz » de 1992 : ne pas laisser l’UE devenir un compétiteur de « l’Empire américain ». Dans les deux cas, il s’agit d’infantiliser l’UE et de maintenir en situation de dépendance.

Alors qu’ils se battent dans un dur affrontement pour destituer le président Trump, Républicains et Démocrates déposent les armes pour voter au Sénat presque à l’unanimité l’imposition de lourdes sanctions contre les sociétés participant à la réalisation du North Stream 2, le doublement du gazoduc qui à travers la Baltique apporte le gaz russe en Allemagne. Sont touchées les sociétés européennes qui participent au projet de 11 milliards de dollars, désormais réalisé presque à 80 %, avec la société russe Gazprom, l’Autrichienne Omy, la Britannico-hollandaise Royal Dutch Shell, la Française Engie, les Allemandes Uniper et Wintershall, l’Italienne Saipem et la Suisse Allseas qui prennent part à la pose des conduites.

Le doublement du North Stream augmente la dépendance de l’Europe au gaz russe, avertissent les États-Unis. Ils sont surtout préoccupés par le fait que le gazoduc —en traversant la mer Baltique dans des eaux russes, finlandaises, suédoises et allemandes— contourne les Pays de Visegard (République Tchèque, Slovaquie, Pologne et Hongrie), les États baltes et l’Ukraine, c’est-à-dire les pays européens les plus liés à Washington par l’OTan (auxquels s’ajoute l’Italie).

La mise pour les États-Unis, plus qu’économique, est stratégique. Ce que con-firme le fait que les sanctions sur le North Stream 2 font partie du National Defense Authorization Act, l’acte législatif qui pour l’année fiscale 2020 fournit au Pentagone, pour de nouvelles guerres et nouvelles armes (y compris spatiales), la colossale somme de 738 milliards de dollars, auquel s’ajoutent d’autres postes portant la dépense militaire états-unienne à environ 1 000 milliards de dollars. Les sanctions économiques sur le North Stream 2 s’insèrent dans l’escalade politico-militaire contre la Russie.

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Une confirmation ultérieure se trouve dans le fait que le Congrès US a établi des sanctions non seulement contre le North Stream 2 mais aussi contre le Turk-Stream qui, en phase finale de réalisation, va apporter du gaz russe à travers la mer Noire jusqu’en Thrace orientale, la petite partie européenne de la Turquie. De là, par un autre gazoduc, le gaz russe devrait arriver en Bulgarie, en Serbie et dans d’autres pays européens. C’est la riposte russe au coup porté par les États-Unis, qui en 2014 réussirent à bloquer le gazoduc South Stream. Celui-ci aurait dû relier la Russie à l’Italie à travers la mer Noire et par la terre jusqu’à Tarvisio (Udine). L’Italie serait ainsi devenue une plate-forme d’aiguillage du gaz dans l’UE, avec de notables avantages économiques. L’administration Obama réussit à faire échouer le projet, avec la collaboration de l’Union européenne même.

La société Saipem (Groupe italien Eni), touchée à nouveau par les sanctions états-uniennes sur le North Stream 2, fut déjà lourdement touchée par le blocage du South Stream : elle perdit en 2014 des contrats d’une valeur de 2,4 milliards d’euros, auxquels se seraient ajoutés d’autres contrats si le projet avait continué. Mais personne à l’époque, ni en Italie ni dans l’UE, ne protesta contre l’enterrement du projet opéré par les États-Unis. Maintenant que sont en jeu les intérêts allemands, s’élèvent en Allemagne et dans l’Ue des voix critiques sur les sanctions US contre le North Stream 2.

On ne dit rien par contre sur le fait que l’Union européenne s’est engagée à importer des USA du gaz naturel liquéfié (GNL), extrait de schistes bitumineux par la destructrice technique de fracturation hydraulique. Washington, pour frapper la Russie, essaie de réduire son exportation de gaz vers l’UE, faisant payer les coûts aux consommateurs européens. Depuis que le président Donald Trump et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont signé à Washington en juillet 2018 la Déclaration conjointe sur la coopération stratégique USA-UE y compris le secteur énergétique, l’UE a doublé l’importation de GNL des USA, co-finançant les infrastructures avec une dépense spéciale initiale de 656 millions d’euros. Cela n’a cependant pas sauvé les sociétés européennes des sanctions USA.

Photo d'illustration: La chancelière allemande Angela Merkel et son ministre de l’Économie, Olaf Scholz, ont immédiatement dénoncé l’ingérence états-unienne.

Traduction Marie-Ange Patrizio

lundi, 23 décembre 2019

Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

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Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce sommet, du 19 au 21 décembre, a réuni des représentants, non seulement de la Malaisie mais de la Turquie, de l'Iran et du Qatar. Supposé rechercher le rassemblement mondial du monde musulman, il a surtout montré que celui-ci se divise actuellement en deux blocs.
 
Ont participé personnellement au sommet le président iranien Hassan Rohani, l'émir du Qatar cheikh Tamim, le président turc Recep Tayyip Erdogan et bien entendu le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad, tous à des titres divers opposés à l'Arabie saoudite. L'absence de celle-ci , bien que prévisible, a été très remarquée. Il faut rappeler que les alliés de l'Arabie saoudite regroupent la plupart des autres pays pays arabes, du Maghreb au Golfe Persique. La plupart d'entre eux, bien qu'invités n'étaient pas présents à Kuala Lumpur

L'Organisation de la Coopération Islamique (OCI), basée dans le port saoudien de Djeddah et généralement considérée comme la voix du monde islamique, a vivement critiqué la tenue de ce sommet. Elle a surtout exprimé en l'espèce la voix de l'Arabie saoudite. Le sommet de Kuala Lumpur a en effet été, que ce soit dans le monde arabe ou dans les pays occidentaux, considéré comme anti-saoudien.

Dans son discours d'ouverture, le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad a annoncé que le sommet visait à comprendre pourquoi l'islam et les pays musulmans étaient «en crise, sans espoir et indigne de cette grande religion». Mais d'emblée il est apparu que les pays musulmans resteraient divisés entre ceux de plus en plus proches de la Russie, à commencer par la Turquie et l'Iran, et ceux qui comme l'Arabie saoudite, restent malgré quelques dissensions de bons allées des Etats-Unis.

Cette division marque aussi l'incapacité de l'islam sunnite de s'entendre avec l'islam chiite, non seulement sur le plan religieux, mais dans de domaine géopolitique. La encore, on retrouve le poids de l'Arabie saoudite dont l'influence dans le monde tient à l'importance de ses réserves en pétrole et en gaz, au contraire des autres pays musulmans, à l'exception de l'Iran. Mais l'Iran, soumise aux sanctions américaines, peine à exporter son pétrole dans les pays arabes qui en auraient le plus grand besoin.

Le premier ministre iranien Hassan Rohani a dénoncé «la domination du dollar américain et du système financier américain». Le premier ministre turc Erdogan a confirmé qu'au lieu de commercer avec des devises étrangères, les pays arabes souhaiteraient commercer commercer avec des devises nationales. Ni l'un ni l'autre ne l'ont dit explicitement, mais cela signifierait pour eux s'affranchir de la domination américaine. Ce que l'Arabie saoudite est encore incapable de faire. 

Note

Pour plus de détails, voir un article de Hasan Alhasan dans Asia Times
https://www.asiatimes.com/2019/12/opinion/kuala-lumpur-summit-points-to-split-in-muslim-world/

Voir également MK Bhadrakumar
https://www.asiatimes.com/2019/12/article/kl-summit-shaken-by-imrans-absence-saudi-ire/

 

 

dimanche, 22 décembre 2019

Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

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Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

Intervention  de François-Bernard Huyghe à la 3° session du forum sur les enjeux technologiques des nouvelles routes de la soie  (19 décembre 2019,  Unesco)
 
Ex: http://www.huyghe.fr
 
D’une route l’autre : un étonnement de vingt-deux siècles

Pour parler des relations « technologiques » entre la Chine et l’Europe, il faudrait sans doute remonter avant notre ère, à l’ouverture historique de la route de la soie. L’Occident découvre alors un produit à la fois
- - hautement désirable (la vogue de la soie perturbe l’économie romaine dès avant l’ère chrétienne),
- - lié au secret (dans la mesure où les acheteurs finaux ne savent ni comment elle est fabriquée, ni comment atteindre directement le pays d’origine)
- - et dont l’exportation a été décidée- par l’Empire dans une stratégie de souveraineté.

Dans l’imaginaire, la Chine devient le pays des Sères (de la soie), mais l’itinéraire (par des pistes caravanières avec de rares abris ou par mer, de port en port et de cale en cale) est long, fractionné et aléatoire et l’information authentique se perd souvent en chemin. Ou laisse place à des légendes.
 

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Ces relations sont marquées pendant des siècles par une quasi ignorance (les choses circulent mieux que les connaissances), mais aussi par un rapport culturel ambigu. Ainsi, au fil des siècles, l’Europe s’étonnera à la fois de l’inventivité technologique de l’Empire, du fait que la maîtrise de techniques (comme l’imprimerie, la poudre ou la boussole) ne produisent pas les mêmes effets et ne débouchent pas sur l’équivalent de la Renaissance ou des grandes explorations. Ou encore de la faculté que possède l’Empire de se fermer brusquement au monde en dépit de sa capacité de l’explorer (comme après l’expédition de Zeng-He en 1433).

Ces trois questions que les Européens se sont posées pendant des siècles - technicité, territorialité et autorité: Comment ? D’où ou par où ? Et selon quelle norme ? - reviennent sous des formes très contemporaines. Comme celle d’une «ceinture économique de la route de la soie» («Silk Road Economic Belt», devenue la «Belt and Road Initiative», BRI).

Le projet des nouvelles routes de la soie vise à développer les infrastructures physiques (des routes, des rails, des tuyaux, des ports, etc.), retraçant et prolongeant les routes maritimes et terrestres séculaires des marchandises. Il nous interroge à neuf sur le rapport entre circulation des choses et des informations, mais aussi sur la relation de l’État avec l’économie. Nous parlons ici de la capacité qu’a Pékin de conserver à la fois ses frontières et de se projeter dans un temps long.

Lancé à un rythme étonnant après un discours de Xi Jinping en 2013, mais se projetant sur plusieurs décennies, le projet bientôt inscrit dans la constitution du parti prend valeur de proclamation solenelle d’une ère d’ouverture et d’accélération. Les moyens suivent : l’adjectif qui revient le plus souvent est celui de « pharaonique » pour désigner des budgets de milliards par an.

Évidemment c’est le caractère unidirectionnel de cette circulation (produits manufacturés, capitaux, transferts monétaires, entreprises mobilisées) qui fait problème. Il suscite une crainte du déséquilibre en termes de puissance et d’influence. D’où des réticences, notamment d’E. Macron, face à une « nouvelle hégémonie ». L’Europe se partage plutôt sur un axe Nord/Sud face au projet des Nouvelles Routes, tandis que s’affirme une contre stratégie américaine, puissance maritime s’inquiétant d’une puissance continentale qui la concurrence au-delà de ce qui était imaginable.

On mesurera aussi en cette occasion comment le politique peut utiliser l’obstacle des normes, l’argument de sécurité et confidentialité, les impératifs écologiques, etc., pour contrôler une montée en puissance politique et économique à la fois.
Vue de l’ouest ou vues de l’est, ces routes témoignent que nous nous sommes trop vite crus libérés des contraintes de la matérialité (l’économie ce sont d’abord des choses qui circulent et qui demandent des voies et des vecteurs) mais nous avons aussi cru trop tôt qu’un modèle technoéconomique unique s’imposait sans que les Nations puissent faire autre chose qu’accélérer ou retarder l’inévitable.
 

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Parallèlement, la façon dont la Chine est devenue une cyberpuissance fut une autre surprise historique. La numérisation du pays montre aussi comment l’État peut
- favoriser l’émergence d’équivalents des GAFAM, mais sans leur accorder d’autonomie géopolitique,
- se protéger des influences extérieures, notamment derrière sa « grande muraille de feu » (un dispositif logiciel qui lui permet de s’isoler comme un Intranet mais à l’échelle de la première population du monde),
- redéfinir les règles de la cyberstratégie internationale, etc.

Le tout concrétise la maîtrise chinoise dans les trois couches du cyberespace, physique (serveurs, câbles, stockage), logique ou logicielle (non dépendance des algorithmes, normes et plateformes made in USA) et enfin sémantique (au sens du contenu des messages accessibles à sa population).

Sans compter le démenti apporté à la thèse qui prédisait que l’Internet menait irréversiblement, sinon vers un cyberespace émancipé du politique, du moins vers l’adoption d’un régime à l’occidentale ou de ses valeurs culturelles. La Chine n’a pas imité le modèle « californien» cher à la Silicon Valley, ni son type de start-up et son mode de conquête des marchés. En cherchant l’explication technique d’un rattrapage surprenant, mais avec d’autres codes, on constate une adaptation culturelle du capitalisme chinois high tech, des rapports étroits avec l’autorité politique, l’exploitation des effets d’échelle (notamment du plus grand gisement de données potentiel de la planète), l’évolution culturelle de la population, l’hyperréactivité au programme étatique d’innovation systématique, l’intégration des services numériques aux modes de vie...

Là aussi se pose la question des supports et infrastructures. Ainsi dans le domaine de la 5G où l’avance de Huawei suscite des réactions à l’énormité de ses investissements en recherche et à ses ambitions. Mais aussi à des soupçons de cyberespionnage. On voit ainsi la Chine protéger à la fois sa « muraille » (en conservant ses données, en se préservant du pouvoir des GAFAM, en contrôlant les contenus) et exporter ses matériels et réseaux. Toujours le va-et-vient entre la connaissance numérique (des données qui peuvent être dérobées ou protégées, des inventions qui peuvent être reproduites) et le support ou le dispositif physique.

D’où les tenttives d’exclusion de leurs marchés de pays se réclamant pourtant du libéralisme : le politique (USA, Australie, Allemagne) redevient interventionnistes lorsqu’il s’agit de protéger son économie d’une influence qui passerait aussi par les infrastructures numériques. Voir l’obligation faite aux appareils Huawei de se passer de la technologie Android Google. La perspective que les écosystèmes numériques puissent littéralement divorcer et se séparer, chose impensable il y a trois ans, s’impose.

Sans doute en réponse, en Chine, une directive gouvernementale dite « 3-5-2 » joue l’autarcie technologique à long terme : elle exige le remplacement des matériels et logiciels informatiques dans l’administration. Ce qui représente un marché gigantesque. Dans le contexte de ce que l’on a surnommé la balkanisation d’Internet, il faut renoncer à la notion que la technologie est sans frontières et le politique impuissant.

La Chine dans le cadre d’un plan « Made in China 2025 » prévoit de relancer largement l’industrie par des investissements publics dans la recherche et de s’émanciper de plus en plus de la technologie étrangère. Mais aussi d’être un grand pays maritime, en pointe dans l’espace, grand exportateur, etc. Cela fait le lien avec sa défense par une éventuelle « guerre des intelligences » qui exploiterait militairement les technologies sophistiquées émergentes (dans le prolongement de la « guerre hors limites » théorisée dès les années 90). Mais en même temps la coopération civilo-militaire, public-privé,central-régional contribue à l’objectif de faire de la Chine un pays qui investit énormément dans la recherche de pointe...

Enfin, l’Intelligence Artificielle (nous aurions aussi bien pu parler de l’espace, des drones, des robots, des objets connectés etc., tout étant lié) est un domaine où s’est engagée une autre course Chine / USA. Il révèle aussi le rapport entre ambition géopolitique et technologie. Suivant la version la plus souvent rapportée, après la défaire du plus grand maître de Go face à un algorithme en 2016, la Chine aurait décidé d’emporter la compétition plus générale pour l’IA.Et notamment dans le domaine de l’IA dite perceptive (qui reconnaît des visages, des mots, un environnement) ou de son intégration aux usages quotidiens.
Là encore il y a des explications à chercher dans le pragmatisme, dans l’échelle de la mutation, dans l’acceptation de la population, dans les interactions entre le pouvoir politique et l’économie...
Tout ceci confère un avantage, si l’on admet qu’à ce stade, les deux principales fonctions de l’IA sont d’imiter ou de remplacer le comportement humain (par un calcul plus complet et des instructions plus adaptées) mais aussi d’anticiper ledit comportement et les interactions avec l’environnement pour une meilleure gestion de notre activité. Éventuellement couplée à des objets connectés ou dispositifs, l’IA devient capable non seulement de présenter la meilleure solution en fonction des règles préétablies, mais aussi de s’adapter à chaque situation et de la modifier.

Là encore, l’IA chinoise est partie tard, mais aussi sans avoir connu les « hivers », les phases de blocage de la recherche (et son financement) depuis les années 50. Elle ambitionne de devenir la première au monde à l’horizon de quelques décennies.
Ce processus repose sur la synergie entre l’autorité politique et les milieux économiques et universitaires, sur l’échelle de la population qui permet l’exploitation de toute innovation mais aussi sur le contrôle de la population. Ainsi le système dit de crédit social, basé sur l’omniprésence des systèmes de surveillance. En attendant en 2020 le crédit social « corporate » pour les entreprises.

Le hardware et le soft, la route et la muraille, le numérique et le tangible, la souveraineté et le négoce, la copie et l’invention... tout nous semble reposer sur des équilibres et des contrôles, dont rien ne garantit d’ailleurs qu’ils dureront éternellement. Ni qu’ils soient adaptables chez nous ou que de soit souhaitable. Mais qui enseignent au moins aux Européens que l’absence de volontarisme politique et la confiance dans les mécanismes technoéconomiques étaient des erreurs.

samedi, 21 décembre 2019

The Real Code of Putinism

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The Real Code of Putinism

Ex: https://www.americanthinker.com

Today's Russia is in the most critical stage of its ideological design.  Its beginning was laid in the article by Vladislav Surkov (aide to the Russian president) under the symbolic title "Long-lasting state of Putin."  The piece was widely discussed by the expert community in Russia and abroad.  Many took this article as a signal that Putin was not going to leave after his presidential term's expiration in 2024 and was preparing his domestic public and international community for this through his éminence grise (as Surkov is often called).  However, with a detailed analysis of the processes that occur in modern Russia, one can come to deeper conclusions.

Vladimir Putin has ruled the country since 2000, and over these 19 years, influence groups around him have been fighting each other for a special position and status.  Unlike most of his associates, Putin is indeed an ideologically motivated leader who perceives himself not just as a politician and an official, but as a sovereign, such as Peter the Great and Alexander III — the beloved emperors of the current Russian leader.

Being aware of the internal construction of Putin's philosophical vision, various people were trying to form an ideological concept that would reflect the mission and goals of modern Russia.  Some wrote about the idea of a "special civilizational path."  It suggested that Moscow would not copy the Western model of development and would not declare itself a part of the Asian world as well.  Others sought to revive the long-forgotten formula "Moscow as the Third Rome" that in fact declared Russia the heir to the fallen Byzantine Empire.  Some suggested a consensus option to combine Western and Eastern civilization codes.  Undoubtedly, there are also groups that do not consider having any ideology important; they offer to copy certain points of the most successful government projects around the world.  However, there is no question of whether Russia needs an ideology or not because Putin is absolutely convinced of the vital necessity of its existence.

There are several reasons for this approach.  Firstly, the president understands that this is about his legacy.  For a psychological type of leader like Putin, the way history remembers him is crucial.  And it is not about love and admiration of the generations to come.  It is difficult to find a politician in Russian and world historiography who could be given an unambiguous assessment.  Discussions continue about everyone without exception, from Alexander the Great to Ronald Reagan.  The key fact is the transformation when a mortal politician becomes an immortal image and an object of constant study for future generations.  Secondly, the Russian leader is convinced that people who were born and raised in independent Russia should have clear guidelines in order to at least preserve the integrity of the country.  So far, Vladislav Surkov was the one who truly managed to systemize the views and ideas of the president.  Putin's aide divided the history of Russian statehood into four parts: the Rus' of Ivan the Third, the Russian Empire of Peter the Great, the Soviet Union of Vladimir Lenin, and the Russia of Vladimir Putin.

The new ideology that is called Putinism is uniting principles and foundations that have remained unchanged throughout all the historical stages of the development of Russia.  Its foundation is the concept of National Democracy.  It implies that the process of democratization and the formation of an active civil society is inevitable but it should not be carried out according to any foreign model.  The Russian nation, like any other, has its civilizational, social, and cultural features.  Today, 190 peoples live in Russia, and most of them retain their language, traditions, and mentality.  From this point of view, Moscow is always under the permanent threat of external forces using any interethnic disagreements for their purposes.  If, for example, a political decision was made to allow same-sex "marriage" in the deeply conservative regions of the North Caucasus, Tatarstan, and Siberia, riots would begin.  And they would lead to the most unpredictable consequences.  For a large part of the progressive West, this may sound wild.  Yet for Russia, it is a matter of national security.

 

It is important to understand that Russia is not limited to Moscow or Saint Petersburg.  These cities, like any major megalopolises, are centers of the dominance of progressive and liberal ideas.  No one will argue with the fact that the United States does not begin and end in New York and California; there are also Texas, Tennessee, Utah, and other states.  The victory of Donald Trump vividly demonstrated that it was conditional Texas and Kentucky that were the heart of America, not Massachusetts and Rhode Island.  The situation is similar in Russia: Putin is guided by the mood of the regional majority, not the liberal minority of the capital.  There are a lot of sensitive problems, and any Russian ruler has to maintain internal balance in order to keep the country's physical integrity.  This is an extremely difficult task.  At certain periods of time, Emperor Nicholas II, and then the last general secretary of the Central Committee of the CPSU, Mikhail Gorbachev, did not cope with this task.  This resulted in the collapse of the Russian Empire and the USSR, respectively.  Thus, the essence of Sovereign or National Democracy is in a banal formula: everything has its time.  In other words, Putinism advocates an evolutionary rather than a revolutionary model of development.

The next crucial element is the inviolability of the mission to maintain territorial integrity.  Why is this so important to Putin?  The answer lies in the dynamics of extension and contraction of Russian territory.  The Russian Empire was the third-largest ever-existing country after the British and Mongol Empires.  It included the Baltic states, part of Poland, Bessarabia, Finland.  Replacing the Empire, the Soviet Union became smaller, losing control of many territorial units.  Then the collapse of the USSR led to the formation of 15 independent republics.  Moreover, centrifugal processes were observed inside independent Russia in the '90s: two Chechen wars, separatist sentiments in Tatarstan, Siberia, and the Far East.  Given this, Moscow has to be sensitive to any threats to territorial integrity because the next collapse will actually mean the end of Russian history.  Based on this, the policy of territorial expansion (or "gathering lands") has strategic importance for Russia.

Most of the countries that were part of the Russian Empire and the Soviet Union performed two significant functions.  The first is an external security function — pushing the borders of the Empire along the entire perimeter, which was of fundamental importance while conducting defensive wars.  It is difficult to imagine how the results of the military campaigns of Napoléon Bonaparte in 1812 and Hitler's Germany in 1941–1945 would have developed without the factor of "deep borders."  The second is the internal defense or controlled decay function.  With the collapse of the Empire, countries located on the periphery and semi-periphery leave, and the core is retained — Russia itself with its internal subjects.

From here follows the next point of the concept of Putinism — returning the post-Soviet space to the sphere of strategic dominance of Moscow.  To achieve this goal, it is important for President Putin to solve two tasks: to provide closer geopolitical integration of Belarus with Russia and to develop high-quality mechanisms of influence on Ukraine.  The Russian leader is deeply convinced that Russians, Ukrainians, and Belarusians comprise a unified nation that should be gathered under the leadership of the Kremlin sooner or later.  This is how it was in the imperial and Soviet periods.  The third task is to prevent the entry of traditional post-Soviet countries (the Baltic countries are not considered) into the North Atlantic Alliance.

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In global politics, Putin sees his mission in revising the results of the Cold War.  He is convinced that the collapse of the Soviet Union was due to the weakening of the center's influence, the indecisiveness of the authorities and the internal intrigues of hostile agents of influence.  Putinism rejects any idea that Russia lost to the United States and should now forget about its geopolitical ambitions.  At the same time, being a pragmatist, Putin realizes that today Moscow does not have sufficient resources to claim world domination.  It is important for the Russian leader that the most powerful actors in the international community develop clear rules for the game.  For Putin, the ideal model combines past systems.  The basis should be sovereignty and the principle of non-interference in each other's internal affairs (Westphalian system), the balance of power (Vienna system), and separation of responsibilities (Yalta and Potsdam system).  From the standpoint of Putinism concept, such an architecture will return Russia the status of great power and force the rest of the countries to reckon with its opinion and interests.

The fundamental feature of the new ideology is that Russia does not regard the West as its enemy.  Moscow sees a certain way of the civilizational and political future of Europe where neoliberal philosophy has set the tone for the past twenty years.  Today, other trends are visible.  One of them is the strengthening of the right-wing conservative powers: Boris Johnson in Britain, the regime of Viktor Orbán in Hungary, the party of Sebastian Kurz in Austria, Euroskepticism in Italy, France, Greece, and Germany.  The basic request of the new generation of European politicians can be described simply: more sovereignty, less dependence.  Even leaders such as Emmanuel Macron state the need for an independent European security system.  This is exactly what Russia wants to see in Europe.  It is important for Putin that Europeans rely solely on their pragmatic interests in building a political and economic dialogue with Moscow.  This narrative is becoming more and more popular in the Old World.

Areg Galstyan, Ph.D. is a regular contributor to The National Interest, Forbes, and The American Thinker.

John J. Mearsheimer, “The False Promise of Liberal Hegemony”

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John J. Mearsheimer, “The False Promise of Liberal Hegemony”

 
 
 
Henry L. Stimson Lectures on World Affairs. John J. Mearsheimer, R. Wendell Harrison Distinguished Service Professor of Political Science and the co-director of the Program on International Security Policy at the University of Chicago, gave a series of three lectures in November on “Liberal Ideals & International Realities” for the Henry L. Stimson Lectures on World Affairs at the Whitney and Betty MacMillan Center for International and Area Studies at Yale.  
 
“The Roots of Liberal Hegemony,” November 13, 2017  https://youtu.be/bSj__Vo1pOU
 
“The False Promise of Liberal Hegemony,” November 15, 2017  https://youtu.be/ESwIVY2oimI
 
“The Case for Restraint,” on November 16, 2017  https://youtu.be/TsonzzAW3Mk  
 
Sponsored by the Whitney and Betty MacMillan Center for International and Area Studies and the Yale University Press.
 

Review: “The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order” by Bruno Maçães

Review: “The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order” by Bruno Maçães

Ex: https://asianreviewofbooks.com

Some international relations scholars and commentators are rediscovering that Eurasia is a geopolitical unit, a “supercontinent”, in the words of Bruno Maçães in his interesting new book The Dawn of Eurasia. Maçães traces the origins of the term Eurasia to Austrian geologist Eduard Suess in 1885, but the idea that Eurasia should be viewed as a single geopolitical unit is traceable to the great British geopolitical theorist Sir Halford Mackinder in a little-remembered article in 1890 entitled “The Physical Basis of Political Geography”.

Mackinder in that article subdivided Eurasia into the “Gulf Stream Region” (Europe) and the “Indo-Chinese” or “Monsoon” region (East, Central and South Asia) where two-thirds of the world’s population lived, and noted both the Silk Road and seafaring trade routes that linked Europe and Asia. In the early 20th century, Mackinder further developed the notion of Eurasia as the world’s dominant landmass and as a potential seat of a world empire.

Maçães, who is currently a Senior Advisor at Flint Global in London, a Senior Fellow at Renmin University in Beijing and the Hudson Institute in Washington, and a former Portuguese Europe Minister, calls the political world of the 21st century the “new Eurasian world”, but, as noted above, there is really nothing “new” about it, at least in a geographical sense. Indeed, history’s greatest land empires—the Mongols, Napoleonic France, Nazi Germany, and the Soviet Union—were Eurasian. And, as Maçães notes, “[t]he border between Europe and Asia was always unstable, untenable and, for the most part, illusory.”

What then is “new” about the Eurasia of the 21st century that is resulting in a “new world order?”

What’s new is a shift in power from West to East.

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The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order, Bruno Macaes (Penguin, January 2019; Yale University Press, August 2018 )

What’s new, according to Maçães, is a shift in power—economic and political—from West to East. It is a shift in power from the western part of Eurasia to its eastern part. But it is also a shift in power from non-Eurasian powers—Britain and the United States—to Eurasian powers—especially China and India. This shift occurred, he believes, because Asia caught up with Europe and the West with respect to science, technology, and innovation; in a word, modernization. Maçães explains:

That the Europeans found themselves in a position to control practically the whole world was a direct result of a series of revolutions in science, economic production and political society whose underlying theme was the systematic exploration of alternative possibilities, different and until then unknown ways of doing things.

Asia embarked on a “fast embrace of modernity” such that modernization has become universal.

Maçães is quick to point out, however, that universal modernization is not equal in all societies and that there are “different models of modern society”. This is especially the case with respect to political models. Asian modernization does not mean that Asian nations will follow the liberal democratic path of Europe and the West. So while economic, scientific, and technological modernization is universal, political systems will remain different. Parag Khanna in his new book The Future is Asian urges Asian powers to reject Western liberal democracy in favor of what he calls “technocratic governance”, which he describes as a form of democratic-authoritarian government similar to Singapore’s.

The new world order flowing from universal modernization among rival nation-states will be characterized, writes Maçães, by “a struggle for mastery in Eurasia”. Again, there is nothing “new” about this, except some of the players. China and India are the most conspicuous rising powers, but Russia has staked its claim in the struggle, too.

The Belt and Road Initiative is “a race for power at the heart of the greatest landmass on earth.”

Maçães writes about his “six-month journey along the historical and cultural borders between Europe and Asia” to show that the borders are not real. He traveled to Azerbaijan, the Caucasus, and other places in the region between the Black and Caspian Seas. He highlights the growing importance of Caspian energy resources to Europe, China and Russia, and the growth of Central Asian cities that lie along the path of China’s new Silk Road. He describes China’s plan for a “new network of railways, roads, and energy and digital infrastructure linking Europe and China.” The Belt and Road Initiative, Maçães writes,has the ambition of creating the world’s longest economic corridor, linking the Asia-Pacific economic pole at the eastern end of Eurasia, and the European pole at its western end.

The land component of this initiative is complemented by the “Maritime Silk Road” that connects China to Europe via the South China Sea, the South Pacific and the Indian Ocean. “Together”, he writes, “the land and sea components will strive to connect about sixty-five countries.”

Maçães views China’s Belt and Road Initiative as more than an economic corridor. It risks, he writes, upsetting old geographical realities and evoking a nineteenth-century world of great-power rivalry, a race for power at the heart of the greatest landmass on earth.

Maçães believes that in the struggle for mastery of Eurasia, Russia is an important variable, and that the Trump administration recognizes this. While President Obama rhetorically pivoted to Asia, Maçães explains, President Trump is seeking to pivot to Eurasia. Trump, he writes, views Eurasia in Kissingerian terms—the United States should have better relations with China and Russia than they have with each other. Trump’s strategy, he believes, “would use closer relations with Russia to limit China’s growing power and influence.”

That is a very 19th-century view of the world, but it makes eminent geopolitical sense in the 21st century. Indeed, in Mackinder’s last article on the subject in 1943 in Foreign Affairs, he envisioned a global geopolitical balance between the North Atlantic nations (the US, Canada, and Western Europe), Russia, and the populous lands of South and East Asia. The result, he hoped, would be “[a] balanced globe of human beings.”


Francis P Sempa is the author of Geopolitics: From the Cold War to the 21st Century and America’s Global Role: Essays and Reviews on National Security, Geopolitics and War. His writings appear in The Diplomat, Joint Force Quarterly, the University Bookman and other publications. He is an attorney and an adjunct professor of political science at Wilkes University.

mardi, 17 décembre 2019

Recep Tayyip Erdoğan ou le maître des maîtres chanteurs

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Recep Tayyip Erdoğan ou le maître des maîtres chanteurs

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

La Turquie n'est qu'une puissance moyenne. Elle dispose de forces armées numériquement importantes mais que l'on dit constituées de jeunes militaires incompétents ou prêts à se vendre au plus offrant. Néanmoins elle possède trois avantages.

Le premier est une situation géographique d'un grand intérêt stratégique, aux frontières de l'Europe et de la Russie. Celle-ci intéresse particulièrement les Etats-Unis, car elle pourrait servir de base avancée à l'US Army dans la perspective de conflits, fussent-ils limités. Le second est sa réputation d'Etat musulman modéré. En tant que tel, les pays européens et la Russie espèrent s'appuyer sur lui dans la lutte contre le terrorisme islamique. Le troisième avantage de la Turquie est son président depuis 2014, Recep Tayyip Erdoğan.

Celui-ci veut faire de la Turquie une vraie grande puissance. Certains disent qu'il voudrait reconstruire un empire Ottoman dont il serait le Sultan. Pour cela il veut se débarrasser des indépendantistes Kurdes qui occupent une partie du territoire turc. Il veut aussi augmenter sensiblement les frontières de la Turquie, en annexant une importante bande frontière entre la Turquie et la Syrie, qu'il a décidé d'occuper militairement. Mais surtout il espère faire de la Turquie un arbitre influent entre les Etats-Unis et la Russie. Pour cela il utilise son appartenance à l'Otan sous direction américaine et s'équipe en matériels américains, Il a promis d'acheter notamment une flotte importante des futurs chasseurs américains F 35, une fois que ceux-ci seront en ordre de vol. . Mais il a eu le coup de génie, il y a quelques mois, d'obtenir de la Russie la vente de systèmes de missiles anti-missiles dits S-400. Ceux-ci se sont révélés bien supérieurs aux Patriot américains. Ils menacent notamment d'impuissance les avions de combat d'Israël et des Etats-Unis 1) .

Depuis plusieurs semaines, la Maison Blanche avait menacé Erdogan d'obtenir son expulsion de l'Otan au cas où il continuerait d'acquérir du matériel militaire russe. Mais elle s'est bien gardé de le faire. Cela l'aurait jeté dans les bras de Moscou. Sur le sujet S-400 versus F 35, on consultera un article de Sputnik .

Aujourd'hui le secrétaire américain à la défense Mark Esper s'est dit inquiet de voir la Turquie « s'éloigner de plus en plus de l'orbite de l'Otan ». Voir un article du site américain indépendant Al Monitor. Il relaie en cela des pressions du Congrès américain visant à remettre Erdogan dans le droit chemin, peut-être en l'excluant de l'Otan.

Mais il y a tout lieu de penser qu'Erdogan ne changera pas d'un iota sa position. Emmanuel Macron pourrait s'inspirer de son exemple s'il voulait faire de la France, qui, tout autant que la Turquie, en a les moyens, une véritable arbitre entre l'Ouest et l'Est

Notes

Note 1

Sur les S-400, on lira ceci, à propos du système russe de radar dont ils sont équipés, et qui fait leur exceptionnalité

The radar tested is the “eye of battle management system” of each battery that detects heavy bombardiers from 570 kilometers (355 miles) and faster fighter planes from 400-450 kilometers (250-280 miles). The “Big Bird” 91N6E acquisition and battle management radar can simultaneously track 300 close proximity enemy targets. The other radar in each battery is a Grave Stone multimode engagement radar. 

This 91N6E radar for the S-400 system is tasked with acquiring and tracking aerial and ballistic targets, identifying targets and performing angle measurements on standoff jamming aircraft. The 92N6E radar in the system is intended to provide autonomous manual and automatic sector sweeps, target acquisition and tracking in adverse weather, electronic counter measures, chaff and low altitude clutter environments. This radar is equipped with identification, friend or foe capability as well.

Note 2

Erdogan menace de fermer la base américaine en Turquie d'Incirlik en réponse aux sanctions

Erdogan Threatens To Shut Incirlik Base To US In Response To Sanctions
https://www.urdupoint.com/en/world/erdogan-threatens-to-shut-incirlik-base-to-us-787979.html

 

 

vendredi, 13 décembre 2019

Les Etats Unis semblent préparer une offensive militaire contre le Mexique ?

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Les Etats Unis semblent préparer une offensive militaire contre le Mexique ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le Mexique est un Etat américain situé à la frontière sud ouest des Etats-Unis. Longtemps considéré comme une quasi-colonie des Etats-Unis , il a pris une relative indépendance avec les succès électoraux du Mouvement de régénération nationale (MORENA)

Celui-ci,  issu de divers mouvements sociaux protestant contre la main-mise sur le pays des multinationales nord-américaine est considéré comme social-démocrate. Depuis le 1er décembre 2018, le président de la République mexicaine provenant de MORENA est Andrés Manuel López Obrador (AMLO)

Ceci en fait pour Washington un ennemi à abattre. L'on y craint que son exemple ne pousse d'autres Etats d'Amérique Centrale et d'Amérique du Sud à revendiquer plus d'indépendance vis-à-vis des Etats-Unis. Aussi, dans les derniers mois, des pressions de plus en plus fortes provenant de l'appareil politico-militaire américain se sont fait sentir pour obtenir de la Maison Blanche une occupation militaire sinon du Mexique tout entier, du moins de ses centres stratégiques, y compris la capitale Mexico . Donald Trump avait jusqu'à présent refusé cette perspective, craignant l'effet défavorable qu'elle aurait eu sur l'opinion mondiale.

Il apparaît aujourd'hui qu'au prétexte de lutter contre les narco-trafiquants provenant du continent sud-américain et s'appuyant sur des gangs mexicains, se préparerait une intervention militaire nord-américaine au Mexique. Il ne s'agirait que d'un prétexte, car nul n'ignore que l'armée américaine, en y mettant les moyens, pourraient parfaitement éviter l'entrée de trafiquants en les empêchant de traverser la « grande barrière USA Mexique » qu'est en train de terminer Donald Trump à cette fin pour empêcher l'immigration illégale et les divers trafics, notamment de drogues.

C'est ainsi que Donald Trump vient d'envoyer à Mexico son Attorney General Bill Barr pour discuter avec AMLO de la façon dont les Etats-Unis pourraient l'aider à lutter contre les narco-trafiquants. L'Attorney général ou Procureur général est l'équivalent d'un ministre de la justice. AMLO aurait pu lui conseiller d'éliminer les narco-trafiquants américains qui prospèrent dans le sud des Etats-Unis, en bonne entente avec leurs homologues mexicains.

Selon un compte-rendu informel – il n'y a eu aucun compte-rendu officiel- le président mexicain a salué la réunion comme productive et a déclaré aux journalistes que son gouvernement n'était pas “en état de confrontation” avec l'administration Trump.
Le président Obrador s'est engagé à coopérer avec Washington sur les questions de drogue, d'armes et de migration, mais il a ajouté que la Constitution mexicaine stipule que “les étrangers ne peuvent pas s'immiscer en politique dans notre pays”. “Nous ne pouvons pas avoir de forces étrangères sur notre territoire à des fins militaires”, a-t-il précisé. 

Il n'est pas possible de dire plus clairement qu'AMLO avait été informé de projets de la Maison Blanche visant à mettre en place sur son territoire des forces armées américaines. Il pouvait craindre que si l'armée ou la police mexicaines s'y opposaient, elles fassent l'objet d'attaques provenant de l'US Army.

Cet avertissement d'AMLO à Bill Barr suffira-t-il, au moins pour le moment, à convaincre Donald Trump qu'il devrait renoncer à envoyer des troupes au Mexique afin qu'elles y demeurent. Ce n'est pas certain. Ce n'est pas la lutte contre les narco-trafiquants qui l'intéresse, mais la possibilité de renverser AMLO au profit d'un président « pupett » tout dévoué à Washington. Ainsi le Mexique redeviendrait ce qu'il a longtemps été, une colonie américaine. L'avertissement serai compris, espère-t-il, au Venezuela, au Guatemala et en Colombie

Mexique https://fr.wikipedia.org/wiki/Mexique

 

1848-redux : envahir le Mexique ?

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1848-redux : envahir le Mexique ?

Ex: http://www.dedefensa.org

Il est incontestable que Trump est sérieux dans ses diverses évocations d’une possible intervention des forces armées des USA au Mexique. Certains nomment cela “invasion” et ils n’ont pas tort, – Tulsi Gabbard la première, qui a dénoncé cette possibilité. La preuve que Trump est sérieux, c’est que son ministre de la Justice (Attorney General [AG]) William Barr se trouvait jeudi à Mexico où  il rencontrait le président mexicain Obrador (AMRO). Obrador s’est voulu très rassurant, très présidentiel et très souverainiste après la rencontre ; il n’a pas le choix à cet égard, malgré la situation terrible où se trouve son pays par rapport aux cartels qui réussissent désormaisde véritables opérations de guerre contre l’armée mexicaine...

« Dans ce contexte, M. Obrador a rencontré le procureur général américain William Barr à Mexico jeudi. Le président mexicain a salué la réunion comme productive et a déclaré vendredi aux journalistes que son gouvernement n’était pas “en état de confrontation” avec l'administration Trump.
» M. Obrador s'est engagé à coopérer avec Washington sur les questions de drogue, d’armes et de migration, mais il a ajouté que la Constitution mexicaine stipule que “les étrangers ne peuvent pas s'immiscer en politique dans notre pays”.
» “Nous ne pouvons pas avoir de forces étrangères sur notre territoire à des fins militaires”, a-t-il dit. »

A ce point et avant de poursuivre, on se permettra d’observer ces quelques faits que l’on peut juger comme sans beaucoup de signification, et que nous jugeons comme significatifs :

• il n’y a pas eu de conférence de presse commune, donc aucune déclaration officielle du ministre Barr corroborant les assurances d’Obrador concernant les articles de la Constitution mexicaine sur l’impossibilité d’une présence de forces militaires étrangères “à des fins militaires” sur le territoire mexicain ;


• il est à notre sens significatif que Trump ait envoyé son AG parler à Obrador, et pas un représentant d’une activité opérationnelle de son gouvernement, soit son secrétaire à la défense (DoD) ou son secrétaire à la sécurité du territoire (DHS), soit le directeur d’une des agences (CIA, FBI, DEA, douanes, etc.) concernées par la surveillance et le contrôle des frontières face à la criminalité (les cartels). Pour nous, cela signifie effectivement que, dans l’esprit de Trump, la situation des cartels en territoire mexicain est absolument et quasi-“légalement” liée à l’activité des cartels en territoire américaniste, toutes choses qui dépendent du point de vue légal par conséquent du puissant ministère de la justice (DoJ), dont dépendent toutes les agences citées plus haut. En d’autres mots, et pour interpréter la pensée volatile de Trump, tout se passe comme s’il considérait l’activité des cartels au Mexique, sur le territoire mexicain, comme une crise “intérieure” pressante qui concerne la justice intérieure aux USA, dont est comptable le département US de la justice pour déterminer des modes d’action si nécessaire, – y compris en territoire mexicain. Cela ouvre bien des perspectives intéressantes.


• Comme l’on sait, Trump a annoncé qu’il allait classer les cartels mexicains comme des “organisations terroristes”, ce qui implique que le gouvernement US se donne le droit à lui-même d’intervenir dans les pays, soit qui aident ces organisations, soit qui les abritent volontairement, soit que ces organisations “occupent” illégalement. Sans doute l’AG Barr, dont dépend en partie (avec le département d’État) cette classification, est venu représenter à Obrador ce que cela signifierait concrètement pour le Mexique.

Parallèlement, le commentateur Tom Kirby vient de publier sur le site Strategic-Culture.org, le  6 décembre 2019, un texte présenté par le titre : « Finalement, une guerre étrangère proche du territoire national » Kirby met en évidence un point effectivement fondamental, tournant autour de cette hypothèse lancée par Trump d’une possible intervention militaire au Mexique :

« Depuis la fin de la Guerre froide, il semblerait que les forces américaines et de l’OTAN passent leur temps à chercher le moindre casus belli de rencontre sinon fabriqué pour déclencher un conflit déstabilisateur dans un pays étranger. Mais ces actions militaires se sont exclusivement concentrées sur des cibles très éloignées de notre pays. Des régions éloignées comme l’ex-Yougoslavie, l’Irak, l’Afghanistan, la Libye, la Syrie se sont toutes trouvées au mauvais endroit, sur la route de notre “interventionnisme bien intentionné”, avec des résultats désastreux pour les populations locales. De ce point de vue, c’est un changement complet avec l’évocation par le président Trump d’une intervention au Mexique pour aider les autorités mexicaines à résoudre le problème des cartels de la drogue, qui est à bien des égards également le problème des cartel de la drogue des USA. Naturellement, la réponse des Mexicains a été négative, mais Washington n'est pas connu pour prendre un “non” pour une réponse acceptable, et si les États-Unis interviennent au Mexique ce sera un type de conflit très différent en raison de la contiguïté géographique des deux acteurs. »

Pour Kirby, et cela d’une façon assez logique, une telle intervention constituerait quelque chose de complètement inédit dans l’époque actuelle, un tournant géopolitique, politique et psychologique majeur, – rien de moins, selon lui, qu’un retour au XIXème siècle... A cet égard, il fait trois remarques essentielles à propos de la possibilité d’une intervention militaire au Mexique.

1). La confirmation de la politique “Fortress America”,qui est la tendance politique prêtée à Trump. Il s’agit de l’état d’esprit continental du président, hostile au globalisme comme un bon américaniste de souche nationaliste et Corporate, peu sensible aux courants extérieurs, bref hostile à tout ce qui n’est pas spécifiquement américain. Trump a déjà montré sa sensibilité aux questions de sécurité intérieure et de sécurité de “l’extérieur proche”, comme disent les Russes. Son obsession pour la frontière Sud est connue, notamment avec l’affaire du Mur sur la frontière, la question des migrants, etc. La question des cartels s’inscrit évidemment dans cette logique crisique et la seule chose qu’on puisse en dire est cette question : comment la question des cartels a-t-elle mis tant de temps à venir à l’esprit de Trump ?

Le non-interventionnisme (tout relatif) de Trump par rapport à ses prédécesseurs ne joue plus son rôle dans ce cas à cause de la proximité géographique et de la logique “Fortress America” : 

« ...Jusqu’à présent Trump s’est montré très réservé dans l'utilisation de la force directe par rapport à ses prédécesseurs. [Une intervention au Mexique] pourrait donner l'impression qu’il abandonne soudainement une de ses promesses de campagne[le non-interventionnisme]. Mais cela pourrait être largement justifié selon les conceptions de sa politique : Trump voit bien peu d’importance de la Syrie pour les USA, et probablement aucune de l’Ukraine pour les USA. Le Mexique est par contre une question complètement différente à cause de la proximité et de la sécurité directe des USA, et elle peut amener le Président à agir de manière plus agressive. »

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2). Une sorte de “doctrine Monroe 2.0”,  qui nous ramène aux USA du XIXème siècle, lorsque ce pays commença triomphalement son expansion vers l’affirmation mondiale, dans des conditions très favorables (Make America Great Again [MAGA] par un retour au bon vieux temps ?). Le non-interventionnisme de Trump est par ailleurs mis de côté lorsqu’il s’agit des Amériques : interventionnisme direct ou indirect, avec diverses formules, au Brésil, au Venezuela, en Bolivie, peut-être un soutien indirect aux troubles au Chili, etc., tout cela montre une réactivation d’une mise en bon ordre américaniste dans l’“arrière-cour” latino-américaine. La question mexicaine s’inscrit complètement dans ce schéma, néo-isolationnisme très américaniste et effectivement “doctrine Monroe 2.0” :

« Trump a déclaré à maintes reprises qu’il craint la Chine par-dessus tout, mais sa passion pour le Mur frontalier et le contrôle de l'immigration amène à faire l’hypothèse que le Mexique est probablement en deuxième place sur sa liste d’ennemis redoutables. Cette volonté d'intervenir pourrait masquer la nécessité (du point de vue du Président) de réaffirmer la domination américaine sur le continent et de répéter le triomphe de 1848 qui explique en partie pourquoi les États-Unis sont devenus une grande puissance. »

3). La réaction de l’opinion publique aux USA en cas d’invasion est le troisième point, et certainement le plus explosif, le plus énigmatique, le plus porteur de déstabilisation. La question n’a absolument rien à voir avec l’apathie du public devant la myriade d’intervention extérieures US après le sursaut des protestations de 2002-début 2003 contre la guerre en préparation contre l’Irak. Lorsqu’on parle d’“opinion publique”, on parle d’abord de la “minorité” que représentent les Hispaniques et les Latino-Américains : « En 2015, ils représent[ai]ent 17,6 % de la population totale des États-Unis et environ 23 % des naissances. Ils sont aujourd’hui la première minorité ethnique devant les Africains-Américains », – et sans doute, aujourd’hui encore, avec plus de 17%. Dans certains États comme la Californie, ils sont la première communauté tout court, devant les WASP.

Ils sont essentiellement d’origine mexicaine avec des liens de plus en plus forts maintenus avec leur pays d’origine, et souvent la double nationalité (lors de la campagne présidentielle qui vit la victoire d’Obrador, l’année dernière, les candidats sont venus faire campagne en Californie tant est grand le nombre de votants pour les élections au Mexique, du fait de cette double nationalité). Kirby ne cesse d’évoquer dans son texte 1848 et la guerre USA-Mexique, et l’on a à l’esprit le mouvement Reconquista qui, chez les Latinos-Américains, vise la reconquête des États d’Arizona, du Colorado, de la Californie, du Nevada, du Nouveau-Mexique et de l'Utah, tous annexés aux USA au terme du traité consacrant la défaite mexicaine. 

Presque comme un présage sinistre, on notera que cette guerre de 1846-1848 fut l’occasion de terribles dissensions internes aux USA entre partisans et adversaires de l’esclavage. C’en fut au point que Ulysses S. Grant, vainqueur de Lee en 1865 et président en 1868, écrivit dans ses mémoires, en 1885 : « La rébellion du Sud [de 1861] fut l’avatar de la guerre avec le Mexique. Nations et individus sont punis de leurs transgressions. Nous reçûmes notre châtiment sous la forme de la plus sanguinaire et coûteuse guerre des temps modernes. »

De ce point de vue, qui pèse d’un poids formidable dans les psychologies, ce troisième point constitue l’inconnue la plus énigmatique et la plus explosive, comme nous écrivions plus haut. Il n’est pas du tout certain que Trump, homme à la mémoire courte et à la culture peu attachée aux aspects les plus fautifs et les plus barbares de l’histoire de l’américanisme, y attache une importance très grande. Il aurait même tendance, d’une certaine façon, à en faire un objet de défi, si l’on se réfère à la façon brutale et antagoniste dont il traite la Californie, État gauchiste (démocrate extrémiste) et antitrumpiste affiché,  mais surtout avec une “minorité-majoritaire” de Latino-Américains, donc comme une sorte de “Mexique à l’intérieur des USA” d’une certaine façon.

Là aussi et là encore, on tient un point de rupture, une fragilité considérable dans l’édifice de bric et de broc que les USA américaniste, de plus en plus rongé par des  termites d’origines, de cultures et d’idéologies diverses. A côté et comme un contrepoint tragique d’une “doctrine de Monroe 2.0” qui se voudrait MAGA, se concentrent toutes les menaces qui planeraient sur les chocs en retour que produirait une éventuelle intervention militaire US au Mexique. Il n’y a rien de plus fascinant pour un esprit aussi étrangement provocateur que celui du président Trump, confronté aux hordes hystériques du progressisme-sociétal.

jeudi, 12 décembre 2019

« Propagande massive des médias en vue d’une confrontation occidentale avec la Chine »

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« Propagande massive des médias en vue d’une confrontation occidentale avec la Chine »

 
 
Auteur : Willy Wimmer
Ex: http://www.zejournal.mobi

« Les plans anglo-japonais visant à diviser la grande Chine unifiée en au moins huit nouveaux États sont connus depuis longtemps. Cela mettrait temporairement en suspens le facteur mondial croissant représenté par la Chine. Dans un avenir prévisible, nous verrons dans les fameux « hot spots » en Chine, où l’on joue encore avec le feu […] »

D’un point de vue global, un sentiment de déjà-vu émerge actuellement en observant la propagande massive des médias en vue d’une confrontation occidentale avec la Chine. On s’attaque délibérément aux anciennes lignes de conflits pour déstabiliser ce pays. Ce sont des signes inquiétants.

Dans le cadre de la guerre en Afghanistan et du déploiement de la Bundeswehr dans la région, un ancien ministre allemand de la Défense a péroré « qu’on défend l’Allemagne au Hindou Kouch » ; mais maintenant il s’agit de la Chine.

L’artillerie de la presse est disposée le long des lignes de conflit, selon la volonté du quartier général de Washington. La province chinoise du Xinjiang et les peuples turcs qui y vivent sont mis en position contre le gouvernement central de Pékin. La situation est parfaitement préparée pour un conflit majeur.

Un conflit d’ailleurs qui, dans sa structure de base, se développe depuis près de trente ans. Actuellement, on joue son rôle, car le mégaprojet chinois des « Nouvelles Routes de la soie » rapproche visiblement le continent euro-asiatique commun. Cela affaiblira de façon permanente la domination américaine des routes commerciales mondiales et des sanctions pour la destruction d’États en temps de paix. Les événements de Hong Kong montrent clairement qu’on s’attaque aux coins et aux aspérités de la Chine.

Les plans anglo-japonais visant à diviser la grande Chine unifiée en au moins huit nouveaux États sont connus depuis longtemps. Cela mettrait temporairement en suspens le facteur mondial croissant représenté par la Chine. Dans un avenir prévisible, nous verrons dans les fameux « hot spots » en Chine, où l’on joue encore avec le feu et où l’on organise la plus grande implication globale possible derrière des manœuvres transparentes de rivalité.

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Dans le Xinjiang, et en particulier en ce qui concerne les Ouïghours, le conflit mondial de base entre les États-Unis et le « reste du monde » se présente de manière exemplaire. Depuis les combats qui se sont déroulés il y a quelques décennies sur les rives du fleuve Ussuri entre les puissances communistes de l’époque, l’Union Soviétique et la République Populaire de Chine, le monde est conscient de la sensibilité de cette région. C’est pourquoi l’ancien président kazakh Noursoultan Nazarbaïev a fait un effort particulier pour développer un mécanisme de prévention des conflits entre les États concernés sur le modèle des Accords d’Helsinki (CSCE).

D’ailleurs, avec beaucoup de succès, comme le montre l’actuel « Organisation de coopération de Shanghai ». À l’est de Moscou, les États y participent parce qu’ils préfèrent le travail laborieux pour la paix au lieu de déclencher la guerre. Depuis l’effondrement de l’Union Soviétique, ces concepts ont fait l’objet de travaux, comme j’ai pu le constater personnellement en participant aux conférences préparatoires à Almaty. Il fallait éviter à tout prix que le processus de désintégration de l’Union Soviétique sur le territoire chinois ne se transforme en une énorme guerre. Les questions frontalières furent réglées et on créa de nouvelles règles d’autonomie pour prévenir la guerre dans une situation dramatiquement compliquée.

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Dès le premier jour, les États-Unis se sont massivement opposés à l’élaboration d’un mécanisme de résolution pacifique des conflits. Le projet de conférence de « l’Organisation de coopération de Shanghai » fut subverti autant que possible. Lorsque les États de la région se sont tout de même mis d’accord, les États-Unis ont quitté le projet de conférence.

Depuis lors, tous ceux qui le souhaitent peuvent observer comment les deux concepts rivaux s’affrontent. Depuis la construction du « barrage des Trois Gorges » sur le Yang Tsé, le gouvernement central chinois tente de modifier la structure démographique de base du Xinjiang en faveur de la population chinoise de souche.

Au cours de la dernière décennie, les magazines allemands ont à maintes reprises et docilement décrit les soulèvements dirigés par la CIA dans cette province. La manière dont le conflit mondial américano-chinois influence l’actualité est illustrée par les attaques des États-Unis contre les investissements chinois au Pakistan en lien avec la Route de la Soie.

Et qu’allons-nous faire en Allemagne ? L’Allemagne impériale, grâce à ses scientifiques et ses expéditions dans cette région, savait ce qui s’y passait. Déjà à l’époque, cela se faisait en rivalité avec d’autres puissances. De nos jours, la décision stratégique prévisible des États-Unis d’installer le siège mondial des Ouïghours à Munich lors de la préparation de « l’Organisation de coopération de Shanghai » était une décision stratégique prévisible. Les mécanismes pouvant en découler sont bien connus dans d’autres conflits : ils ont abouti à la guerre.

L’Europe demeure mentalement sous tutelle américaine...

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L’Europe demeure mentalement sous tutelle américaine...
 
Entretien avec Caroline Galactéros
 
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Caroline Galactéros à l'hebdomadaire Marianne à l'occasion de la sortie de son recueil de chroniques Vers un nouveau Yalta (Sigest, 2019). Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et intervient régulièrement dans les médias. Elle a créé en 2017, avec Hervé Juvin, entre autres, Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.

Macron et l’Otan : “ L’Europe demeure mentalement sous tutelle américaine ”

Marianne : La Chine et les Etats-Unis nous mènent-ils à une nouvelle Guerre froide ?

Caroline Galactéros : Il me semble que poser la question en ces termes nous fragilise et nous empêche – nous, Européens, mais aussi les autres parties du monde, l’Afrique, l’Asie, l’Amérique latine -, de voir la réalité dans sa complexité et ses opportunités. Cela nous emprisonne dans une prétendue alternative où nous n’aurions le choix qu’entre un “maitre” et un autre. Certes, le nouveau duo-pôle stratégique de tête entre Washington et Pékin – qui est autant un duel qu’un duo -, surdéterminera de plus en plus la vie internationale comme les chaines d’influence, d’intérêts et de dépendances. Cependant, le nombre des acteurs, comme l’intrication des intérêts et des enjeux font que le paysage international a profondément changé par rapport à celui qui prévalait durant la Guerre froide jusqu’au tournant du XXIe siècle, avec les attentats du 11 septembre 2001.

D’un point de vue stratégique, cette tragédie fut un coup de semonce aux dimensions telluriques. L’étoile américaine a dès lors commencé à pâlir en termes de crédit moral (discrédit aggravé à partir de 2003 et de l’invasion de l’Irak), mais aussi en termes de suprématie militaire et de crédibilité perçue. On a assisté à l’émergence de nouveaux modèles de puissance et de nouvelles ambitions jusqu’alors bridées, qui se consolident depuis, à la faveur des calculs hasardeux de l’Occident en matière d’intervention (Libye, Syrie, Yémen), de fiascos sécuritaires (Afghanistan, Irak), de nos graves inconséquences ou complaisances catalysées en terreur islamiste menaçant la cohésion des sociétés européennes. Sans parler des ingérences vécues comme de moins en moins justifiables, quelles que soient les parties du monde ciblées comme devant bénéficier de notre martiale bienveillance démocratique.

Le Sahel est un autre de ces théâtres immenses où se répand le désordre du monde et révèle notre difficulté croissante à y faire converger développement et lutte contre le terrorisme. Dans cette immensité, la France porte quasi seule le fardeau d’une mission retardatrice de la déstabilisation djihadiste sur fond d’États faillis et de menace migratoire. Elle vit, dans la chair de ses enfants tombés au combat, une impuissance structurelle que masquent de moins en moins l’excellence et l’héroïsme de nos armées. Ce drame se noue tandis que l’Amérique, avec l’Otan, y est en embuscade, et lorgne ce considérable marché sécuritaire et d’armements, et tandis que la Chine et la Russie sont elles aussi en lice. Moscou notamment, forte de ses succès syriens dans la lutte anti-djihadiste, commence à trouver un écho à ses propositions d’appui auprès de populations qui se sentent abandonnées, quand ce n’est pas flouées, par leurs pouvoirs comme par l’approche militaire française qui leur semble insuffisante face à la recrudescence de la violence et des effectifs des groupes armés. Ici comme ailleurs, l’urgence s’impose d’une réflexion désinhibée et sans tabous sur la sécurité de la région, loin des pressions américaines pour y installer l’Alliance ou de celles de Pékin. Seul un tel effort nous permettra de défendre notre crédibilité militaire, mais aussi nos intérêts et nos principes démocratiques.

Quoi qu’il en soit, pour l’heure, mis à part en Europe, qui peine décidément à sortir de sa gangue et à grandir enfin, il n’existe plus de réflexe ni de volonté de s’aligner sur l’un ou l’autre “camp”, même si Washington comme Pékin essaient évidemment, chacun à leur manière, de rallier des clientèles anciennes ou nouvelles et de sécuriser leur contrôle politique, militaire ou économico-financier sur le maximum possible d’acteurs. Des puissances régionales telles que la Turquie, l’Iran, ou même l’Inde, poussent chacune leur agenda. C’est évidemment aussi le cas de l’ancien deuxième “Grand”, la Russie, qui est toujours demeurée une puissance globale, mais peut désormais le réaffirmer pleinement depuis ses succès militaires et diplomatiques en Syrie et dans tout le Moyen-Orient. Plus généralement, le caractère totalement décomplexé des actes comme des paroles de tous ces acteurs illustrent les effets délétères de la destruction méthodique des règles et structures du multilatéralisme et le boomerang de la promotion détabouisée de l’intérêt national, grand vainqueur de ce jeu de massacre. Les Etats-Unis eux, ne se résolvent pas à voir émerger un autre empire et menacer leur préséance. D’où les crispations au sein de l’ONU, de l’OMC, la remise en cause de presque tous les accords et traités multilatéraux (et bilatéraux comme avec la Russie en matière de désarmement), et naturellement la crise de l’Otan, qui n’est pas en état de mort cérébrale mais souffre de fortes migraines depuis que certains alliés ont réalisé, à la faveur des agissements turcs en Syrie avec aval américain, que leur avis comptait décidément pour du beurre. Ce n’est pourtant pas un scoop !

Avec la Russie, n’existe-t-il finalement pas une tripolarisation ?

La Russie est une puissance globale qui a subi depuis 30 ans des coups de boutoir incessants de la part de l’Occident. Mais elle en a vu d’autres… Moscou a parfaitement mesuré, au contraire de l’Europe qui veut ignorer qu’elle est un simple outil d’affaiblissement de l’Eurasie voire une proie industrielle et technologique pour son grand Allié, qu’elle devait consolider sa puissance et son influence sous peine d’écrasement progressif entre la vindicte américaine et le “baiser de la mort” chinois. Puissance eurasiatique par excellence elle est plus que jamais l’acteur pivot de cet immense espace. Elle y poursuit méthodiquement l’intégration économique culturelle et sécuritaire autour de l’Union économique eurasiatique (l’UEE) et de l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) notamment. L’UE ignore superbement (comme elle le fit pour les Nouvelles routes de la Soie chinoises) cette dynamique florissante à ses portes. Pourtant, l’UEE est la matrice d’un pendant à l’UE.

C’est évident. C’est en cours. Moscou recherche “l’intégration des intégrations” et à terme, souhaite inscrire son rapprochement avec l’Europe communautaire dans un schéma très gaullien d’une Europe l’atlantique à Vladivostok voire au-delà. Au lieu de persister dans notre sidération et notre complexe de l’orphelin transatlantique, nous aurions tout intérêt à inscrire le futur de l’Europe dans cette nouvelle dimension eurasiatique. Les opportunités économiques industrielles de coopération mais aussi sécuritaires nous donneraient une masse critique incontournable entre Chine et Etats-Unis. L’Eurasie est pour moi la « Nouvelle frontière » de l’expansion vers l’Est de l’ensemble européen. Et la prise de conscience de cette évidence pourrait permettre à la France de jouer un rôle moteur dans cette projection d’influence et de puissance.

Ce n’est pas pour rien que Zbigniew Brezinski dans Le Grand échiquier, a ingénument rappelé l’obsession américaine d’une fragmentation de l’Eurasie et d’une division de l’Europe de l’Ouest avec l’instrumentation de la “menace russe” comme vecteur d’un affaiblissement durable de l’ensemble européen. Cette ligne stratégique américaine est toujours à l’œuvre et totalement transpartisane. La pression pour l’élargissement de l’UE et de l’Otan à tous les anciens satellites soviétiques, la guerre contre la Serbie, la déstabilisation de la Géorgie et de l’Ukraine, la diabolisation de plus en plus ridicule de la figure de Vladimir Poutine : tout cela vise à rendre impossible – car dangereux pour la domination américaine sur le Vieux Continent -, un rapprochement de l’Europe avec la Russie qui signifierait la fin de la vassalisation pour nous et l’émergence d’un ensemble centrasiatique intégré selon des cercles concentriques et des coopérations sectorielles multiples, à géométrie variable, plus à même de résister aux offensives commerciales ou normatives américaines et chinoises. Seul peut-être Donald Trump avait-il compris l’intérêt de se rapprocher de Moscou contre Pékin et contre l’Europe. On sait ce qu’il lui en a coûté politiquement avec un Russia gate interminable et désormais la curée pour l’impeachment

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Quel rôle peut jouer l’Union européenne dans tout cela ?

L’Europe demeure mentalement, plus encore qu’économiquement, sous tutelle américaine. Elle peine à sortir de son immaturité stratégique consentie. Elle a peur de devoir penser et plus encore se penser par elle-même. Trump ou pas Trump, les fondamentaux de la puissance et de l’impérialisme américain n’ont de fait pas bougé d’un iota. C’est la méthode qui a changé, et le gant de velours qui s’est simplement transformé en gant de crin…. Nous devons en tirer les conséquences et saisir cette opportunité pour nous penser en temps qu’ensemble de nations souveraines ayant des intérêts économiques, sécuritaires migratoires, stratégiques, technologiques, industriels et de défense propres. Il nous faut redéfinir l’intérêt national, ne plus opposer la souveraineté des nations européennes à la sauvegarde de l’ensemble européen, oser désobéir, refuser l’imposition destructive pour nos sociétés et nos économies d’une extraterritorialité injustifiable, et ne pas craindre de riposter. Le temps est venu d’une rébellion concrète non pour plastronner mais pour survivre. La France semble en passe de prendre, pour l’heure encore bien seule, la tête de cette croisade salutaire. Il faut juste du courage et tenir, car les représailles, pressions, chantages, intimidations vont pleuvoir pour tester notre détermination. Mais il en va de notre avenir commun.

L’OTAN nous range-t-elle forcément dans le camp des Etats-Unis ? 

Le sommet des soixante-dix ans de l’Alliance a mis en valeur l’ampleur de la discorde interne des visions, et surtout la prise de conscience française qu’il est temps de regarder la réalité en face. L’OTAN est en échec sur tous ses théâtres d’action. Nous ne contrôlons ni ne décidons rien en cette enceinte. Notre président a le courage de le dire et de briser une omerta embarrassée qui n’a que trop duré. L’OTAN, de fait, entretient les tensions et n’a à son bilan que des échecs à mille lieues de l’effet stabilisateur annoncé. Car son rôle est de persister dans l’être, de justifier un contrôle politique américain sur ses membres, de geler l’Europe au plan stratégique et de vendre des armes. Elle empêche structurellement l’Europe de s’émanciper alors que celle-ci en a les moyens, et que les “garanties otaniennes” -notamment le fameux « parapluie nucléaire américain »- ne sont plus crédibles à l’heure d’un pivot décisif et durable des préoccupations stratégiques américaines vers l’Asie et la Chine. Washington ne veut simplement plus payer pour la sécurité des Européens ni intervenir à leur profit, mais entend continuer à les diriger et à leur faire rendre gorge au nom du “partage du fardeau” … et au profit des marchands d’armes américains. Le reste est du decorum. Comment faire sans l’OTAN ? C’est assez simple en fait : commencer par renforcer considérablement notre “outil militaire” pour faire face au spectre élargi des menaces qui pèsent sur la sécurité de nos concitoyens et de nos intérêts, au loin comme sur le territoire national ; élargir notre vision à la dimension eurasiatique en termes sécuritaires et de défense ; initier des coopérations avec ceux qui le souhaitent sans exclusive ni naïveté ; enfin appuyer les efforts de ceux des États que l’unilatéralisme américain cible et affaiblit. Ils sont extrêmement nombreux. Alors le leadership français rêvé prendra corps et inspirera confiance et espoir.

Le Moyen-Orient est-il encore au centre de l’attention ? 

Il semble en effet sorti du scope en ce moment, mais c’est l’effet déformant du zapping médiatique et politique comme de la densité de l’actualité internationale. Je pense aussi que l’on se tait car on n’a plus grand-chose à dire ni de discours victorieux ou seulement martiaux à mettre en scène sans rougir. Les masques sont tombés. La France a été progressivement sortie du jeu moyen-oriental. Nos calculs politiques indéfendables moralement ont de plus échoué pratiquement. La Syrie a échappé au démembrement et est en passe de recouvrer son intégrité territoriale. Mais ce n’est pas fini pour autant. Les Etats-Unis nous ont laissé, avec la Turquie autorisée à agir à sa guise dans le Nord-Est syrien, une bombe à fragmentation redoutable. Grand allié du flanc sud de l’Alliance c’est-à-dire de Washington, Erdogan la représente de fait sur le théâtre syrien. Il sait à merveille jouer de son double positionnement stratégique pour Washington contre Moscou, et tout aussi important pour Moscou contre Washington…

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Les Kurdes ont parié et perdu, mais leur sens pratique et leur instinct de survie les rallient à la cause syro-russe qui seule peut leur épargner la fureur ottomane. L’Iran, essaie en dépit de toutes les pressions de consolider son arc d’influence régional. Quant à Israël, il vient, après Jérusalem, de récupérer le Golan avec la bénédiction américaine (ce qui, au passage, remet la question de la Crimée en perspective) : Une provocation considérable pour les Libanais comme pour les Jordaniens et un nouvel encouragement à la déstabilisation régionale.

Et puis il y a le Yémen. L’inhumanité de cette guerre ingagnable où nous avons si coupablement joué les utilités et la folie saoudienne sont en passe de lasser même le parrain américain. Les Emirats Arabes Unis adoptent une attitude prudente…. Peut-être une brèche vers la sortie d’un conflit désastreux pour l’image moderniste du royaume wahhabite ? Rien n’est réglé et il est à parier que des scénarii guerriers occupent des centaines de planificateurs militaires au Pentagone.

Le “processus de Genève”, dédié à la sortie politique du conflit syrien et vicié dans son essence, est un échec flagrant. Mais la Russie, pragmatique et habile, a admis son “couplage” symbolique avec le Processus d’Astana dirigé par Moscou et bien plus efficace. Peut-être l’embryon d’une solution politique acceptable pour ce pays martyr qui a échappé à l’emprise islamiste radicale ? Les anathèmes contre « Bachar bourreau de son peuple » et les accusations d’usage d’armes chimiques de moins en moins étayées contre le régime syrien, tout cela doit nous faire réaliser que nous l’avons échappé belle. Que serait aujourd’hui le Moyen-Orient s’il était passé sous la coupe des Frères musulmans en Égypte, en Syrie avec les parrains qataris et turcs et les innombrables surgeons terrifiants d’Al-Qaida ? La France doit sortir de cette compromission criminelle et si dangereuse pour son propre équilibre national.Notre président pourrait exprimer, au nom de la France, un mea culpa sincère pour nos errements passés. Ce serait un coup de tonnerre diplomatique. Une renaissance. Un geste d’honneur que seul un homme d’État ayant une hauteur de vue et de cœur suffisantes peut faire sans crainte.

Un geste qui change la donne, libère les consciences. Rien à voir avec la repentance ridicule, tout avec l’honneur d’un chef d’Etat capable de reconnaitre que son pays s’est trompé, qu’il l’a lui compris et que tout peut être différent à l’avenir. Nous ne sommes pas frappés à jamais d’une malédiction et il est grand temps pour notre pays de définir une nouvelle politique étrangère indépendante et libre, qui nous sorte des fourvoiements moraux, des complaisances électoralistes ou des préoccupations mercantiles si peu à la hauteur des enjeux du monde et de ce que nous voulons être. Nous vendons des armes certes, et elles sont excellentes. Parmi les meilleures au monde. Notre industrie de défense est un pan important de notre socle d’emploi et d’excellence technologique. Mais nous ne devons plus être des proxys américains ou saoudiens qui vendent leur âme pour quelques contrats. Nous pouvons vendre à des Etats qui se défendent, plus à ceux qui mettent la planète à feu et à sang.

Sur tous ces sujets, l’inflexion présidentielle sensible, observable depuis quelques mois doit être saluée, car elle rompt avec des années de servitude volontaire à contre-emploi de nos intérêts comme de nos principes. Il faut réinventer notre politique étrangère, introuvable depuis 15 ans au moins, et prendre nos distances à l’intérieur ou en dehors s’il le faut, d’une Alliance atlantique dont le bilan est catastrophique mis à part celui de sa persistance dans l’être et de l’entretien de menaces inexistantes.

Caroline Galactéros, propos recueillis par Kévin Boucaud-Victoire (Marianne, 5 décembre 2019)

lundi, 09 décembre 2019

Des nouvelles du Bélarus

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Des nouvelles du Bélarus

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Le dimanche 17 novembre dernier, près de sept millions de Bélarussiens ont renouvelé les 110 sièges de la Chambre des représentants. Coincé entre la Russie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne et l’Ukraine, le Bélarus – qu’on appelle en France la Biélorussie – demeure le seul État du continent à ne pas céder aux injonctions du détestable Conseil de l’Europe en appliquant toujours l’indispensable peine de mort.

Dirigé depuis 1994 par Alexandre Loukachenko, le Bélarus et son excellent président auraient dû figurer en bonne place dans le Dictionnaire des populismes sous la coordination d’Olivier Dard, de Christophe Boutin et de Frédéric Rouvillois. En effet, une multitude d’articles n’hésitent jamais à qualifier le modèle politique en vigueur à Minsk de « populiste ».

Ces élections législatives sont anticipées; elles auraient dû se dérouler en septembre 2020. La Chambre des représentants est élue pour quatre ans au scrutin majoritaire uninominal à un tour. Outre la prise en compte des votes blancs et nuls, l’électeur peut aussi choisir le bulletin « Aucun d’entre eux ». Si ce bulletin spécifique, voire l’abstention, atteint 50 % comme ce fut le cas lors du second tour des législatives françaises de juin 2017, les autorités doivent invalider le scrutin.

L’opposition payée par les officines de Soros et les observateurs de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ont évoqué l’impossibilité pour des opposants de se présenter. Ils ont critiqué des pressions administratives sur les nombreux fonctionnaires et dénoncé d’éventuelles fraudes massives. Le bidule de Strasbourg qu’il ne faut pas confondre avec l’Union dite européenne devrait plutôt se pencher sur ces municipalités communistes, socialistes, centristes et Les Républicains de l’Hexagone où le clientélisme généralisé, la corruption endémique, le bourrage des urnes et le taux élevé de votes post mortem sont des habitudes bien installées. Maints candidats de l’ancien Front national auraient mille anecdotes à raconter sur ce sujet inépuisable…

Le Bélarus populiste ne plie pas devant la Finance internationale et son principal larbin, les États-Unis d’Amérique. Le président Alexandre Loukachenko qui entend se représenter l’an prochain pour un sixième mandat consécutif de cinq ans n’adhère à aucun parti et ne dispose même pas de sa propre formation politique. Il bénéficie en revanche de l’appui implicite d’une majorité présidentielle qui vient de remporter la totalité des sièges. La participation a augmenté de 2,6 %, d’où une abstention à 22,69 %. Les bulletins blancs et nuls s’élèvent à 0,94 %. Quant au choix « Aucun d’entre eux », il baisse de 1,09 %, soit 8,48 %.

Les grands vainqueurs des législatives restent les candidats indépendants avec 60,31 % des voix et 89 élus. Ils perdent cependant cinq sièges et 6,70 %. Le Parti communiste du Bélarus (10,67 %, en progression de 3,2 %) prend trois sièges supplémentaires, soit un total de onze élus. De tendance sociale-démocrate et en hausse de 3,88 %, le Parti républicain du travail et de la justice recueille 6,75 % et six élus. Variante locale du mouvement nationaliste grand-russe de Vladimir Jirinovski, le Parti libéral-démocrate du Bélarus conserve son unique député, mais avec 5,36 %, il progresse de 1,12 %. La gauche nationale incarnée par le Parti patriotique bélarussien maintient lui aussi ses deux élus en dépit d’une faible audience nationale (1,43 %) et un retrait de 0,73 %.

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Trois nouvelles formations liées à la majorité présidentielle informelle ont présenté quelques candidats. En dépit d’un résultat national décevant (0,89 %), le Parti agraire obtient un élu. Une formation atypique à l’intitulé original, le Parti socialiste des sports bélarussien, récolte 0,15 %. Quant au Parti républicain d’inspiration eurasiste, il ne réalise que 0,14 % des suffrages.

Les oppositions nationale-centriste, atlantiste et pro-occidentaliste du Front populaire et des communistes dissidents balayées, la nouvelle assemblée va pouvoir collaborer avec le Conseil de la République. Elle aussi élue pour 4 ans, cette chambre haute compte 56 membres élus par les conseils des représentants locaux des sept oblast (ou régions) dont la capitale et huit membres nommés par le président de la République. Celui-ci, conscient des fragilités géopolitiques et économiques de sa patrie louvoie entre Moscou, Pékin et Bruxelles. Parfois confronté comme au printemps 2017 à une vive contestation sociale, le président Loukachenko qui écoute avec une rare attention ses compatriotes a eu le courage politique de renoncer à certains projets.

Malgré d’inévitables défauts inhérents à la nature humaine, Alexandre Loukachenko appartient aux derniers véritables grands hommes d’État de la planète. En revanche, ni la France ni l’Europe n’ont cette chance.

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 150, mise en ligne sur TV Libertés, le 2 décembre 2019.

dimanche, 08 décembre 2019

La guerre invisible des normes

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La guerre invisible des normes

 
 
Auteur : Abdelkader Diabi
Ex: http://zejournal.mobi
 

« L’influence sur les règles et normes internationales, c’est-à-dire sur les règles du jeu économique, est une composante essentielle quoique peu visible de la compétitivité des entreprises et des États. Les régulations internationales ne sont jamais innocentes, elles déterminent des marchés, fixent des modes de gouvernance, permettent à leurs auteurs de devancer la concurrence, ou de la freiner, ou d’exporter leurs contraintes. Les acteurs privés contribuent de plus en plus à leur élaboration. Exercer de l’influence (ou lobbying ou advocacy) implique la mise en œuvre de stratégies et d’actions communes, dont l’absence ou la faiblesse aujourd’hui nuit à des Français par ailleurs dotés de compétences pointues dans tous les domaines ».

C’est par ces mots que Claude Revel commençait son rapport remis à la ministre de l’économie en 2013. C’est dire l’importance capitale que revêt la question des normes dans un marché globalisé.

De prime abord, la notion de norme se rapporte aux règles, principes et critères auxquels se réfère tout jugement ou encore un repère : se fonder sur la norme admise dans une société. En peut la définir aussi comme l’Ensemble des règles de conduite qui s’imposent à un groupe social. La définition est d’ordre général. La notion est au centre d’enjeux qui dépasse la simple définition linguistique. La norme est assimilée à la règle fixant les conditions de la réalisation d’une opération, de l’exécution d’un objet ou de l’élaboration d’un produit dont on veut unifier l’emploi ou assurer l’interchangeabilité. (Les travaux de normalisation internationale sont menés par l’Organisation internationale de normalisation [International Organization for Standardization], conventionnellement appelée ISO, qui publie des normes internationales destinées à harmoniser entre elles les normes nationales. Il existe aussi un Comité européen de normalisation [CEN]).

***

Normes, la guerre invisible

Problématique

Habituellement, à la suite d’une compagne de R&D, une innovation donne naissance à un brevet. Ce brevet est déposé devant des instances nationales, régionales ou internationales. C’est un sésame, par le biais duquel, son détenteur s’octroi, par la force de la loi, une exploitation exclusive sur l’aire géographique administrée par les mêmes instances ayant enregistré ledit brevet. C’est un monopole consenti sur une période précise avant sa mise au rebut. Toute entreprise souhaitant utiliser ce brevet doit préalablement avoir l’accord du détenteur moyennant royalties.

C’est une expression de puissance par excellence. À partir du dépôt du brevet, l’innovation en question devient la norme jusqu’à l’émergence d’une nouvelle innovation.

Dans la pratique, l’espionnage industriel contredit ce schéma idéal. Il réussit à se procurer le brevet de manière détournée. L’éclatement des instances dans une économie mondialisée n’assure plus de protection des intérêts du détenteur de brevet. Comme ce travail s’effectue à l’ombre, les concurrents peuvent rattraper le temps perdu sans subir les même dépenses matérielles et humaines. Par ailleurs, les instances internationales ne peuvent protéger ces brevets car des pays comme la Chine n’ont pas ratifiés les accords permettant cette protection.

A partir de là, le détenteur d’une innovation a le choix entre la breveter avec le risque que cela peut engendrer ou encore mieux en faire la norme. Ceci revient à la gratuité d’accès à la norme mais une influence manifeste et un leadership sur le marché.

Définitions

En 1947 les instances internationales se sont accaparé le sujet. Ainsi l’organisation internationale de normalisation voyait le jour. Cette instance donne cette acception à cette notion de la norme comme suit : « L’ISO établit des documents qui définissent des exigences, des spécifications, des lignes directrices ou des caractéristiques à utiliser systématiquement pour assurer l’aptitude à l’emploi des matériaux, produits, processus et services ».

L’énumération des catégories de normes fait état d’un inventaire non exclusif. En peut énumérer les suivantes :

  • Normes professionnelles et/ Ou institutionnelles technique comme celles de l’ISO.
  • Normes standards non
  • Accord commerciaux Bilatéraux.
  • Accords commerciaux des différentes alliances internationales, régionales ou continentales.
  • Directives européennes.
  • La grande famille des normes de lois molles ou de
  • De son côté, l’AFNOR (Association française de normalisation) classe les normes en quatre types : fondamentales, de spécifications, de méthodes et d’essais et celle d’organisation. La logique d’orientation du contenu de la norme serait la suivante :
    • Les résultats : normes de
    • Les moyens : normes
    • Il est opportun de distinguer norme, règlement et standard :
    • Norme : Règles du jeu volontaires définies par consensus entre l’ensemble des acteurs du marché
    • Règlements : application obligatoire
    • Standard : spécifications établies par un groupe restreint d’acteur (Consortium ou forum…etc).

Instance de gouvernance

L’innovation est source de normes. Les États ont besoin de norme pour réguler les affaires et les rapports entre acteurs économiques au quotidien. Il arrive que les États courent derrière la norme sans pour autant être trop restrictif et bloquer l’innovation et la production du génie humain.

Depuis sa création l’ISO a édité 22662 normes internationales disponibles à la vente auprès des membres ou sur le store de l’ISO. D’emblée, nous sommes en face d’un produit commercial. La réalité est plus complexe. L’ISO n’a pas le monopole sur la promulgation des normes. Il est clair que la norme est au cœur de stratégies et d’enjeux planétaires. La notion est hissée au rang de moyen d’influence et de domination, raison pour laquelle elle devient un outil et une fin en soi. Entre les mains de l’entité qui l’édite, elle lui procure une position dominante sur les autres concurrents car c’est cette entité qui dicte les règles du jeu. Par conséquent, celui qui tient la norme tient le marché avec une bonne longueur d’avance. Ceci est d’autant plus vrai que les instances émettrices de normes sont légion et d’obédiences différentes.

L’importance accordée au sujet diffère d’un pays à l’autre. Le budget de l’AFNOR en 2018 était de 82,3[1] million d’euros alors que celui du National Institute of Standards and Technology (NIST) s’élevait à 945 millions de dollars[2]. Rien qu’à travers le budget on comprend la place de la norme dans les politiques publiques et qu’on souhaite en faire en France et de l’autre côté de l’Atlantique. Il s’agit d’influence normative. Un outil efficace dans l’arène de la mondialisation envers une concurrence féroce. Une arme redoutable pour prendre de l’avance ou pour attaquer et retarder les autres. Il n’est pas anodin de signaler qu’aux Etats Unis d’Amérique. Les meilleurs chercheurs vont au NIST alors qu’en France la recherche fondamentale est mieux perçue.

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En Grande-Bretagne le sujet est porté par le British Standard Institution (BSI) et par le DIN en Allemagne. Ceci est vrai pour les normes ISO. Cependant pour les normes de Soft Low la chose diffère. En Allemagne, ce sont les Länder qui sont investi de promouvoir les normes. Ils associés aux acteurs économiques pour la promulgation des normes industrielles notamment.

Les Anglais se font représenter par leurs meilleurs spécialistes dans les instances de normalisation. Ils sont leaders dans la Responsabilité Sociale des Entreprises. Les allemands, de leur côté sont très investis dans les normes industrielles. Les français sont plus investis dans l’ISO. Ce dernier n’est pas un espace de stratégie et ne s’implique point dans le champ politique. C’est l’une des raisons du retard des entreprises françaises par rapport à leurs rivales car l’objectif même de l’ISO est la standardisation alors que la conquête de nouveaux marchés nécessité la différentiation et l’innovation.

La Chine est un acteur de plein droit de la mondialisation. Elle s’est inscrite dans ce jeu en se réinvestissant dans les institutions internationales et recrute d’ancien dirigeant des instances internationales à la retraite. Idem pour l’Inde ce grand pays caractérisé par sa force tranquille à ce jour. A une nuance près, le cas de la Chine se distingue : elle est passée d’un pays connu pour la copie et la contrefaçon à un grand émetteur de norme ce qui change la donne dans les rapports internationaux.

Influence, Veille et protection

La norme est au cœur des stratégies d’influence et des dispositifs d’intelligence économique. La norme est une partie importante du patrimoine à protéger. C’est un excellent vecteur d’influence et un sujet central pour le dispositif de veille stratégique qui peut l’utiliser comme une arme économique.

Le sujet des normes est très subtil. Il a été un point déclencheur de la réorientation de l’appareil américain du renseignement. L’affaire date du début des années 90 lorsqu’une jeune star up américaine souhaitant investir le marché nippon se fait spoliée de son innovation par une mastodonte local. Ce géant a réussi à se procurer le process et l’a fait breveter au Japon. Depuis la jeune entreprise américaine ne pouvait vendre son modèle de lampe car il est consenti exclusivement à l’entreprise locale.

L’appartenance à un système d’intelligence économique vaut cher surtout si c’est le plus puissant au monde. Les 17 agences américaines ont entrepris une série d’investigations menant à une découverte : celle que les sociétés américaines se font volées leurs innovations car non protégées. Depuis, la puissance de cet appareil a été déployé pour accompagner l’expansion mondialisée des entreprises américaines.

La grande nouveauté dans l’échiquier est l’entrée en jeu d’acteurs non- gouvernementaux parmi lesquels on cite les ONG productrice d’une nouvelle forme de lois à savoir celles dites lois molles ou Soft Low.

Le protectionnisme par les normes

Les États Unis d’Amérique n’hésitent pas à recourir au protectionnisme et au patriotisme économique. Le congrès américain s’est opposé à la vente d’entreprises stratégiques ou du moins des secteurs symboliques. La vente d’IBM aux chinois et Qualcom ont été bloquées, du moins partiellement pour la branche stratégique d’IBM, car elle risquait de compromettre les intérêts et actifs stratégiques américains si ces technologies tombaient entre les mains d’acteurs hostiles aux États Unis d’Amérique. Pas loin de nous, la guerre déclarée contre Huawei, leader mondial de la 5 G, en dit long sur la guerre des normes que se font les États et les grands acteurs économiques. Huawei est l’expression de la puissance chinoise et donc de la position dominante sur les marchés de télécommunication et par extension la nanotechnologie. C’est de l’avenir de la toile qu’il est question. Si les États Unis d’Amérique sont leader sur le Net et à travers les GAFAM, la Chine déploie cette technologie comme support de transmission du Net. Ainsi, cette norme est devenue une arme contre celles utilisées par les Américains pour défendre leurs intérêts. Ces derniers arguent que Huawei espionne les communications à travers sa technologie. En réalité, ils ont bien assimilé la stratégie chinoise qui compromets leurs intérêts. Depuis, les États-Unis d’Amérique tablent sur la 6 G à venir.

Lors de ces hostilités, un phénomène est apparu au grand jour : le patriotisme économique américain et les liens étroits entre opérateurs économique et appareil d’État. Ainsi, lorsque le département d’État a intimé à Google de suspendre sa collaboration avec Huawei, Google s’est appliqué en reléguant ses engagements commerciaux au second rang de ses priorités. Huawei a été très soutenu par l’État chinois. En France, les sociétés se positionnent comme libre d’engagement vis-à-vis de l’État. Le scandale Alstom, société naquit grâce à l’effort étatique, est révélatrice d’un malaise profond celui de l’absence de patriotisme et de la grande braderie des fleurons économiques d’où une perte de puissance dévastatrice qui relègue le pays à la seconde division économique voir de vassal dépendant.

C’est une guerre économique d’un genre nouveau mêlant intérêts étatiques et privés dans l’expression de la puissance et la domination. La même affaire met en relief la périlleuse position de dépendance. A partir de ces affaires, il devient urgent pour les États de se doter de technologies propres pour assurer sa souveraineté.

La norme concrétise parfaitement le partenariat des États avec leurs entreprises. C’est la manifestation de la notion d’appartenance à un système d’intelligence économique. L’impulsion de l’État français a donné naissance à des champions économiques dans le secteur de la GSM qui a permis un essor économique fulgurant. La notion d’exception culturelle française a permis la protection du marché culturel lors de la libéralisation du secteur sur influence de l’union européenne.

Pour comprendre ce jeu subtil nous devons nous intéresser à des cas concrets.

Émergence des ISDS

Les accords TTIP ou TAFTA ou encore le CETA ont institué les fameux ISDS (Investor- State Dispute Settlement) pour règlement des différends entre investisseurs et États en donnant plus de moyens aux multinationales. Cette novation est assimilable à une privatisation de la justice et une substitution aux instances juridiques nationales et supranationales à travers le principe de subsidiarité. C’est un déni de toute une branche du droit communautaire à savoir le droit public économique. La volonté à travers les accords TAFTA est d’instituer une nouvelle norme de règlement des litiges sans passer par la justice. L’arrêt du 6 mars 2018 de la Cour de justice de l’Union Européenne met un arrêt aux ISDS en estimant qu’ils ne sont pas compatibles avec le droit communautaire. Il a fallu plus de 10 ans et l’intervention de Cour de Justice de l’Union Européenne pour stopper cet artifice d’échapper au droit commun.

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C’est là un exemple de norme qui échappant aux Etats du fait des acteurs privés éditeurs de normes non-institutionnelles.

Les Américains qui imposent leurs normes au reste du monde

Norme IFRS. Principe de convergence des normes (Néo impérialisme)

Les travaux de l’IAAFT et l’influence de l’IASB[3] ont amené à la généralisation des normes IFRS. Les entreprises de l’Europe continentales sont sorties très démunies de cette mutation. Là ce sont deux visions qui s’opposent. La première basée sur le principe européen de prudence comptable, donc vision à long terme, contre celle dite de faire value. (Cotation la plus proche possible de la valeur du marché).

À la suite de la crise de 2008, l’implémentation imposée des normes IFRS a obligé les banques européennes à revoir la valorisation de leurs actifs et à vendre ces actifs avec 600 milliards de pertes[4]. Cette perte constitue un handicap pour les banques européennes qui perdent autant de poids face aux américaines qui dominent le monde de la finance.

Normes sur l’archivage

Une compagne savamment orchestrée a été orchestrée pour l’implémentation d’une norme portants sur les archives. Celle-ci voudrait une organisation et ordonnancement selon une logique précise. En France, la loi oblige à stocker, dans certains cas, les archives pendant 30 ans. L’externalisation et la privatisation de ces services devient pratique courante. Il est très facile pour une entité avisée de se procurer ces archives avec un relai local et de simples moyens financier. Quel acteur économique local irai s’investir dans cette entreprise ? Certainement pas un local mais l’entité avisée qui a organisé toute la manœuvre pour faire main basse sur ces archives. Tous les savoirs et informations contenues dedans seraient cédés gratuitement à cette entité.

Mondialisation et démondialisation

La norme a participé à l’essor de la mondialisation car elle était synonyme de standardisations. La libre circulation des personnes (dans une certaine mesure), biens capitaux et services a favorisé la logique du village global accentué par l’avènement des technologies numériques. C’était l’époque de l’abrogation des frontières et de l’effacement des Etats au profit des multinationales.

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Actuellement, on vit une ère qui amorce la démondialisation. Dérégulation et démondialisation du monde, thèmes chers à Bill Gates, sont des concepts en vogue. On assiste à une vague de normalisation et de régulation avec de nouveaux partages des marchés et derrière l’identification de nouvelles zones d’influence. C’est le retour à la souveraineté des États qui se manifeste à travers la mise en place de mesures protectionniste[5].

De l’Union Européenne

La norme est un frein pour la Construction européenne dans l’absence de système d’Intelligence économique européen. La problématique de la norme a trahi la construction européenne dans le sens où elle en constitue une limite. Les entreprises s’identifient à un seul système d’intelligence économique. Ces systèmes sont en opposition et c’est de bonne guerre. Ceci crée une distorsion à la une logique d’union vue la multiplicité des systèmes référents qui sont étatiques. A moins d’implémenter un système d’intelligence économique européen, vingt-sept systèmes cohabiteront et les efforts seront vains car ils s’opposent et s’annulent entre eux. Le sujet devient une nécessité pour apaiser les querelles intra-européennes et les réorienter vers des velléités envers l’espace extra-européen.

Conclusion

La stratégie classique des quatre segments change. Le produit star n’est plus symbole de simple progrès technologique mais plutôt synonyme d’innovation. Celle-ci se traduit en norme, devient arme et manifestation de puissance économique permettant l’anticipation sur la concurrence et l’affrontement globalisé.

La guerre des normes concerne tous les pays. Plus les États-Unis que la Chine. La Chine entame une phase d’innovation et intègre le processus de normalisation à sa démarche de puissance économique.

La norme est une arme au service d’une stratégie. La bataille des idées va avec celle des normes. Certains États disposent d’agendas et poursuivent une vision d’ensemble pour l’atteinte d’objectifs prédéfinis. C’est dire que leur feuille de route inclut la norme et l’utilisant comme manifestation de puissance.

Il est grand temps pour les autres, comme la France de s’approprier le sujet et d’en faire un atout pour promouvoir son économie. Cette entreprise serait peine perdue sauf si elle est orchestrée au niveau européen cet espace communautaire permettant l’atteinte de taille critique et la manifestation d’une puissance normative vecteur de réussite économique.

Notes:

[1] Rapport du Sénat l’impact de la normalisation.

[2] NIST_and_NTIS_FY2019_President’s_Budget_for_508_comp.pdf

[3] The International Accounting Standards Board

[4] Pascal Junghans : intervention dans émission de France culture : la guerre des normes

[5] Blog de Jacques Sapir


- Source : Infoguerre

vendredi, 06 décembre 2019

Faut-il quitter l'Otan ?

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Faut-il quitter l'Otan ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

On retrouve dans la déclaration des dirigeants de l'Otan publiée à la suite de leur réunion de Londres des 3 et 4 décembre 2019 le langage convenu qui est traditionnel dans les comptes-rendu des réunions de l'Otan.

On pourra l'examiner en détail pour voir en quoi elle diffère des dernières réunions plénières précédentes. Mais il ne faudrait pas oublier que l'Otan a été et reste mise en place par les Etats-Unis pour enrégimenter les pays européens dans la perspective d'un conflit militaire, avec l'URSS initialement, par la suite avec la Russie. 

Les Etats-Unis voulaient initialement empêcher que l'URSS, devenue aujourd'hui la Fédération de Russie ( Российская Федерация, Rossiïskaïa Federatsiïa) n'envahisse ce qu'ils considèrent encore comme leur arrière-cour, sinon leur colonie, l'Europe de l'Ouest d'abord, le continent européen tout entier aujourd'hui. Très vite, cependant, au fur et à mesure que l'Union européenne s'affirmait, ils ont voulu en faire une base avancée, diplomatique mais aussi militaire, leur permettant de provoquer sinon d'attaquer la Russie sur ses frontières occidentales.

Celle-ci s'était donné progressivement la maîtrise de l'arme nucléaire, initialement conçue par le Pentagone comme devant rester son monopole. Même si aujourd'hui d'autres Etats disposent d'armements atomiques dits à courte et moyenne portée, la Russie possède des ICBM ou missiles intercontinentaux dotés d'une tête nucléaire susceptibles de détruire les centres vitaux américains. Elle ne cesse de les perfectionner tout en se dotant de nouvelles armes aujourd'hui imparables telles que les missiles hypersoniques. 

Contre ce danger, d'ailleurs en grande partie exagéré par la propagande américaine, les Etats-Unis ont plus que jamais  besoin de l'Europe. Ils y ont établi des dizaines de bases militaires où ils abritent des contingents importants de l'US Army. Leurs navires de guerre circulent librement dans les eaux territoriales européennes. Ils comptent aussi sur l'appui que leurs donneraient contre la Russie des forces européennes aujourd'hui renforcées. 

Au delà de cet intérêt, ils ont besoin des importantes importations de matériels militaires américains auxquelles procèdent les Européens, même la France qui s'est pourtant dotée depuis les origines d'une force nucléaire indépendante. Ils tentent aujourd'hui d'utiliser l'Otan pour faciliter leurs efforts de pénétration au Sahel et plus généralement en Afrique francophone. Plus significativement et plus dangereusement pour la paix mondiale, ils s'efforcent d'obtenir de l'Otan un appui dans la crise ukrainienne, terrain où ils se trouvent loin de leurs bases.

Le vrai risque qui menace aujourd'hui les Etats Européens est la volonté de l'internationale islamique (Daesh) de mettre progressivement la main sur l'Europe. Mais les Européens ne peuvent pas compter à cet égard sur l'Otan américanisé. Ils ne devraient pas oublier que Daesh a été dès son origine financée et aidée militairement par la CIA américaine en vue d'empêcher la Russie d'augmenter son influence au Moyen Orient. Aujourd'hui encore, il est possible que les services secrets américains continuent à aider le terrorisme islamique.

La Russie aujourd'hui ne menace pas la sécurité et l'indépendance des Etats européens membres de l'Otan. Celle-ci à d'autres priorités que d' « envahir l'Europe ». Il est de plus en plus visible par contre, pour ceux qui veulent bien voir, que ce danger provient de la maîtrise quasi absolue que se sont données les entreprises numériques américaines, notamment les GAFAS, sur l'Internet occidental. Cette maîtrise se traduit par le poids écrasant pris en Europe non seulement par la  culture américaine de loisir, mais sur les réseaux numériques à haut débit et les services associés qui, dans une large mesure, tiennent les Européens en servitude.

Ceux-ci ont été empêchés par Washington de se doter de variantes de l'Internet, technologiques et culturelles, véritablement européennes de souche, si l'on peut dire. Elles leur auraient permis de figurer dans le monde numérique de demain autrement que comme des relais passifs des Etats-Unis face aux internet chinois et russes qui se mettent actuellement en place.

Si les Européens voulaient vraiment se protéger, ils conviendraient que c'est tout autant à l'égard des Etats-Unis que de la Russie qu'ils devraient le faire. Autrement dit, ils devraient se retirer de l'Otan et construire entre eux des alliances non seulement économiques mais militaires capables d'assurer leur défense contre les dangers extérieurs actuels et futurs. L'Europe, 2e puissance économique du monde, aurait largement les moyens de se doter en propre des effectifs et des matériels nécessaires. Mais les gouvernements européens, dans leur écrasante  majorité des "puppets" de Washington, ne le feront jamais.  

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Annexe

 

Déclaration de Londres publiée par les dirigeants des pays de l'OTAN à leur réunion tenue à Londres les 3 et 4 décembre 2019

  1. Aujourd'hui, nous sommes réunis à Londres, là où l'OTAN a établi son premier siège, pour célébrer le 70e anniversaire de l'alliance la plus solide et la plus réussie de l'histoire, ainsi que pour commémorer le 30e anniversaire de la chute du rideau de fer. L'OTAN garantit la sécurité du territoire de nos pays et celle de leurs citoyens, au nombre d'un milliard, ainsi que notre liberté et les valeurs que nous partageons, parmi lesquelles la démocratie, la liberté individuelle, les droits de la personne et l'état de droit. La solidarité, l'unité et la cohésion sont des principes fondamentaux de notre Alliance. Alors que nous œuvrons ensemble à prévenir les conflits et à préserver la paix, l'OTAN reste le fondement de notre défense collective et le forum essentiel pour les consultations et la prise de décision en matière de sécurité entre Alliés. Nous réaffirmons le lien transatlantique qui unit durablement l'Europe et l'Amérique du Nord, notre adhésion aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, ainsi que notre engagement solennel, inscrit dans l'article 5 du traité de Washington, selon lequel une attaque contre un Allié est considérée comme une attaque contre nous tous.
     
  2. Nous sommes résolus à partager le coût et les responsabilités qu'implique notre sécurité, qui est indivisible. Grâce à notre engagement en matière d'investissements de défense, nous augmentons ces investissements pour nous conformer aux seuils de 2 % et de 20 % qui y sont définis, nous investissons dans de nouvelles capacités et nous fournissons plus de forces pour les missions et opérations. Les dépenses de défense hors États-Unis ont augmenté pendant cinq années consécutives ; un montant supplémentaire supérieur à 130 milliards de dollars des États-Unis est investi dans la défense. Conformément à notre engagement inscrit dans l'article 3 du traité de Washington, nous continuons de renforcer notre capacité individuelle et collective de résistance à toute forme d'attaque. Nous accomplissons des progrès appréciables. Nous devons et nous allons faire davantage.
     
  3. Nous sommes confrontés, en tant qu'Alliance, à des menaces et défis distincts, qui émanent de toutes les directions stratégiques. Les actions agressives de la Russie constituent une menace pour la sécurité euro-atlantique ; le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations demeure une menace persistante pour nous tous. Des acteurs étatiques et non étatiques mettent à mal l'ordre international fondé sur des règles. L'instabilité observée au-delà de nos frontières favorise aussi la migration irrégulière. Nous sommes confrontés à des menaces cyber et hybrides.
     
  4. L'OTAN est une alliance défensive et ne représente une menace pour aucun pays. Nous adaptons nos capacités, notre stratégie et nos plans militaires dans l'ensemble de l'Alliance conformément à notre approche à 360 degrés en matière de sécurité. Nous avons pris des décisions afin d'améliorer la disponibilité opérationnelle de nos forces pour qu'elles puissent répondre à tout moment à n'importe quelle menace, d'où qu'elle vienne. Nous restons déterminés dans notre engagement à lutter contre le terrorisme et nous agissons ensemble avec une plus grande fermeté pour en venir à bout. Nous agissons et continuerons d'agir d'une manière mesurée et responsable face au déploiement par la Russie de nouveaux missiles de portée intermédiaire, qui sont à l'origine de l'extinction du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) et qui font peser des risques importants sur la sécurité euro-atlantique. Nous intensifions notre action pour protéger nos libertés, en mer et dans les airs. Nous renforçons encore notre aptitude à assurer la dissuasion et la défense par une combinaison appropriée de capacités nucléaires, conventionnelles et de défense antimissile, que nous continuons d'adapter. Aussi longtemps qu'il y aura des armes nucléaires, l'OTAN restera une alliance nucléaire. Nous sommes pleinement attachés à la préservation et au renforcement d'un système efficace de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération, compte tenu de l'environnement de sécurité du moment. Les Alliés sont fermement attachés à la pleine mise en application du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) dans tous ses aspects, à savoir le désarmement nucléaire, la non-prolifération et les utilisations de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. Nous restons ouverts au dialogue, et à la perspective d'établir une relation constructive avec la Russie lorsque les actions de cette dernière le permettront.
     
  5. Nous nous employons à accroître la sécurité pour tous. Nous avons renforcé les partenariats dans notre voisinage et au-delà, approfondissant le dialogue politique, le soutien et la collaboration qui s'exercent avec les pays partenaires et les organisations internationales. Nous réaffirmons notre engagement en faveur de la sécurité et de la stabilité à long terme en Afghanistan. Nous accroissons notre coopération avec l'Organisation des Nations Unies ; des progrès sans précédent sont enregistrés dans la coopération OTAN­UE. Nous sommes attachés à la politique de la porte ouverte de l'OTAN, qui renforce l'Alliance et a apporté la sécurité à des millions d'Européens. La Macédoine du Nord, présente à nos côtés en ce jour, deviendra bientôt le tout nouveau membre de notre Alliance. Nous sommes déterminés à assurer la réussite de toutes nos opérations et missions. Nous rendons hommage à tous les hommes et à toutes les femmes qui ont servi au nom de l'OTAN, et nous honorons la mémoire de tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour préserver notre sécurité.
     
  6. Pour maintenir notre sécurité, nous devons regarder ensemble vers l'avenir. Nous prenons en compte l'éventail et l'étendue des nouvelles technologies pour conserver notre avance technologique, tout en préservant nos valeurs et nos normes. Nous continuerons d'accroître la résilience de nos sociétés, ainsi que de nos infrastructures critiques et de notre sécurité énergétique. L'OTAN et les Alliés, dans les limites de leurs compétences respectives, sont déterminés à garantir la sécurité de leurs communications, y compris la 5G, conscients de la nécessité de recourir à des systèmes sécurisés et résilients. Nous avons déclaré l'espace en tant que milieu d'opérations de l'OTAN, reconnaissant ainsi son importance s'agissant de préserver notre sécurité et de relever les défis en la matière, dans le respect du droit international. Nous étoffons nos moyens d'action face aux cyberattaques, et nous renforçons notre aptitude à assurer la préparation, la dissuasion et la défense face aux tactiques hybrides visant à porter atteinte à notre sécurité et à nos sociétés. Nous développons le rôle de l'OTAN en matière de sécurité humaine. Nous sommes conscients que l'influence croissante et les politiques internationales de la Chine présentent à la fois des opportunités et des défis, auxquels nous devons répondre ensemble, en tant qu'Alliance.
     
  7. Compte tenu de l'évolution de l'environnement stratégique, nous invitons le secrétaire général à présenter aux ministres des Affaires étrangères une proposition approuvée par le Conseil pour que soit mené, sous les auspices du secrétaire général, avec le recours à l'expertise pertinente, un processus de réflexion prospective visant à renforcer encore la dimension politique de l'OTAN, y compris la consultation.
     
  8. Nous exprimons notre gratitude au Royaume-Uni pour l'accueil généreux qui nous a été réservé. Nous nous réunirons de nouveau en 2021.
     
  9. En des temps difficiles, nous sommes plus forts de par notre Alliance, et nos populations plus en sécurité. Le lien qui nous unit et notre engagement mutuel garantissent nos libertés, nos valeurs et notre sécurité depuis 70 ans. Nous agissons aujourd'hui afin de faire en sorte que l'OTAN soit la garante de ces libertés, de ces valeurs et de cette sécurité pour les générations à venir.
 

 

 

jeudi, 05 décembre 2019

Comprendre ce que fait Donald Trump

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Comprendre ce que fait Donald Trump

par Sylvain Laforest

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

Le moment est venu de comprendre ce que fait Donald Trump et de décrypter l’ambigüité de la manière dont il le fait. Le controversé président a un agenda beaucoup plus clair qu’on ne peut l’imaginer sur la politique étrangère et les affaires intérieures, mais puisqu’il doit rester au pouvoir ou même en vie pour atteindre ses objectifs, sa stratégie est si raffinée et subtile que presque personne ne la comprend. Son objectif global est si ambitieux qu’il emprunte des courbes elliptiques aléatoires pour aller du point A au point B, en utilisant des méthodes qui déconcertent les gens sur leur compréhension de l’homme. Cela inclut la plupart des journalistes indépendants et les analystes alternatifs, comme les grands médias occidentaux propagateurs de fausses nouvelles et une grande majorité de la population.

En ce qui concerne sa stratégie, je pourrais faire une analogie rapide et précise avec les médicaments : la plupart des pilules sont destinées à guérir un problème, mais elles sont accompagnées de toute une série d’effets secondaires. Eh bien, Trump utilise ces médicaments uniquement pour leurs effets secondaires, alors que la première intention de la pilule est ce qui le maintient au pouvoir et en vie. À la fin de cet article, vous verrez que cette métaphore s’applique à presque toutes les décisions, actions ou déclarations qu’il a faites. À partir du moment où vous comprendrez Trump, vous serez en mesure d’apprécier l’extraordinaire mandat présidentiel qu’il accomplit, comme aucun prédécesseur n’a jamais été proche de le faire.

Pour commencer, clarifions le seul aspect de sa mission qui est sans détour et terriblement direct : il est le premier et seul président US à s’être jamais attaqué au pire défaut collectif de l’humanité, soit son ignorance totale de la réalité. Parce que les médias et l’éducation sont tous deux contrôlés par la poignée de milliardaires qui dirigent la planète, nous ne savons rien de notre histoire qui a été tordue à sec par les vainqueurs, et nous ne savons absolument rien sur notre monde actuel. En entrant dans l’arène politique, Donald a popularisé l’expression « fake news » (fausses nouvelles) pour convaincre les citoyens US, tout comme la population mondiale, que les médias mentent toujours. L’expression est maintenant devenue banale, mais réalisez-vous à quel point il est choquant de constater que presque tout ce que vous pensez savoir est totalement faux ? Les mensonges médiatiques ne couvrent pas seulement l’histoire et la politique, mais ils ont façonné votre fausse perception sur des sujets comme l’économie, l’alimentation, le climat, la santé; sur tout. Et si je vous disais que nous savons exactement qui a tiré sur JFK depuis le monticule herbeux, que la connaissance préalable de Pearl Harbor a été prouvée en cour, que l’effet de serre du CO2 est scientifiquement absurde, que notre argent est créé par des prêts de banques qui n’ont même pas les fonds, ou que la science démontre avec une certitude absolue que le 11 septembre fut une opération interne américaine ? Avez-vous déjà entendu parler d’un journaliste mainstream, d’un documentaire de PBS ou d’un professeur d’université parlant de tout cela ? 44 présidents se sont succédés sans jamais soulever un mot de cet énorme problème, avant que le 45ème n’arrive. Trump comprend que la libération des gens de cette profonde ignorance est le premier pas vers la liberté totale, or il a immédiatement commencé à appeler les journalistes mainstream par ce qu’ils sont : des menteurs pathologiques.

« Des milliers de professionnels de la santé mentale sont d’accord avec Woodward et l’auteur de l’article d’opinion du New York Times : Trump est dangereux » – Bandy X. Lee, The Conversation 2018

« La question n’est pas de savoir si le Président est fou, mais s’il est fou comme un renard ou fou comme un fou » – Masha Gessen, The New Yorker 2017

Soyons clairs : pour l’establishment, Trump n’est nullement déficient, mais il est plutôt considéré comme le destructeur potentiel de leur monde. Depuis qu’il a emménagé à la Maison-Blanche, Trump a été dépeint comme un narcissique, un raciste, un sexiste et un climato-sceptique, chargé d’un passé louche et affublé de troubles mentaux. Même si environ 60% des Américains ne font plus confiance aux médias, plusieurs ont avalé l’histoire que Trump pourrait être cinglé ou inapte à diriger, et les statistiques sont encore plus élevées à l’extérieur des États-Unis. Bien sûr, Donald ne fait rien de spécial pour changer la perception profondément négative que tant de journalistes et de gens ont de lui. Il est ouvertement scandaleux et provocateur sur Twitter, il apparait impulsif et même stupide la plupart du temps, agit de façon irrationnelle, ment tous les jours, et distribue des sanctions et des menaces comme si c’était des bonbons sortis de la hotte d’un elfe dans un centre commercial en décembre. D’emblée, on peut détruire un mythe médiatique persistant : l’image que projette Trump est autodestructrice, et c’est exactement le contraire dont les pervers narcissiques agissent, puisqu’ils veulent être aimés et admirés par tous. Donald ne se soucie tout simplement pas que vous l’aimiez ou non, ce qui fait de lui l’ultime anti narcissique, par sa définition psychologique de base. Et ce n’est même pas ouvert aux opinions, c’est un fait tout simple et indéniable. 

Son plan général se dégage d’une de ses devises préférées : « Nous redonnerons le pouvoir au peuple » , parce que les États-Unis et leur toile impérialiste tissée à travers le monde ont été entre les mains de quelques banquiers mondialistes, industriels militaires et des multinationales depuis plus d’un siècle. Pour accomplir sa mission, il doit mettre fin aux guerres à l’étranger, ramener les soldats à la maison, démanteler l’OTAN et la CIA, prendre le contrôle de la Réserve Fédérale, couper tout lien avec les alliés étrangers, abolir le système financier Swift, démolir le pouvoir de propagande des médias, drainer le marais de l’État Profond qui dirige les agences d’espionnage et neutraliser le gouvernement parallèle qui se tapis dans les bureaux du Conseil des Relations Étrangères et de la Commission Trilatérale. Bref, il doit détruire le Nouvel Ordre Mondial et son idéologie mondialiste. La tâche est immense et dangereuse, c’est le moins qu’on puisse dire. Heureusement, il n’est pas seul.

Avant d’aborder ses tactiques et techniques, nous devons en savoir un peu plus sur ce qui se passe réellement dans le monde. 
 

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La puissante Russie

Depuis Pierre le Grand, toute l’histoire de la Russie est une démonstration permanente de sa volonté de maintenir son indépendance politique et économique vis-à-vis des banques internationales et de l’impérialisme, poussant cette grande nation à aider de nombreux autres pays à conserver leur propre indépendance. Par deux fois, la Russie a aidé les États-Unis contre l’Empire britannique/Rothschild, d’abord en les soutenant ouvertement pendant la guerre d’Indépendance, puis encore pendant la guerre civile, alors que Rothschild finançait les Confédérés pour démanteler la nation et la ramener sous la coupe de l’Empire colonial Britannique. La Russie a également détruit Napoléon et les Nazis, tous deux financés par des banques internationales comme outils pour écraser des nations économiquement indépendantes. L’indépendance est dans l’ADN russe. Au terme de presque une décennie d’oligarchie occidentale ayant pris le contrôle de l’économie russe après la chute de l’URSS en 1991, Poutine a pris le pouvoir et a immédiatement drainé le marais russe. Depuis lors, chacune de ses actions vise à détruire l’Empire US, ou l’entité qui a remplacé l’Empire Britannique en 1944, qui est aussi la dénomination non-associée aux théories de la conspiration du Nouvel Ordre Mondial. Ce nouvel empire est fondamentalement le même modèle des banques centrales, avec juste un groupe légèrement différent de propriétaires qui ont changé l’Armée royale Britannique pour l’OTAN, comme Gestapo mondiale.

Jusqu’à l’arrivée de Trump, Poutine luttait seul contre le Nouvel Ordre Mondial dont l’obsession séculaire est le contrôle du marché mondial du pétrole, puisque le pétrole est le sang qui coule dans les veines de toute l’économie mondiale. Le pétrole a mille fois plus de valeur que l’or. Les cargos, les avions et les armées ne fonctionnent pas avec des batteries. Par conséquent, pour contrer les mondialistes, Poutine a mis au point les meilleurs systèmes de missiles offensifs et défensifs, de sorte que la Russie peut désormais protéger tous les producteurs de pétrole indépendants comme la Syrie, le Venezuela et l’Iran. Les banquiers centraux et le gouvernement de l’ombre US s’accrochent toujours à leur plan mourant, car sans une victoire en Syrie, il n’y a pas d’élargissement d’Israël, mettant ainsi fin au fantasme centenaire d’unir la production pétrolière du Moyen-Orient entre les mains du Nouvel Ordre Mondial. Demandez à Lord Balfour si vous avez le moindre doute. C’est ça le véritable enjeu de la guerre de Syrie, il ne s’agit rien de moins que d’y arriver ou de mourir.
 
Un siècle de mensonges

Maintenant, parce qu’un gouvernement de l’ombre commande directement la CIA et l’OTAN au nom des banques et des industries, Trump n’a aucun contrôle sur l’appareil militaire. L’État Profond est un chapelet de fonctionnaires permanents gouvernant Washington et le Pentagone qui ne répondent qu’à leurs ordres. Si vous croyez toujours que c’est le « Commandant en chef » qui commande, expliquez pourquoi chaque fois que Trump ordonne de se retirer de Syrie et d’Afghanistan, des troupes supplémentaires arrivent ? Au moment où j’écris ce texte, les troupes US et de l’OTAN se sont retirées des zones kurdes, se sont rendues en Irak et sont revenues avec du matériel plus lourd autour des réserves pétrolières de la Syrie. Donald doit encore drainer le marais avant que le Pentagone n’écoute ce qu’il dit. Trump devrait être outré et dénoncer à haute voix que le commandement militaire ne se soucie pas de ce qu’il pense, mais cela déclencherait un chaos inimaginable, et peut-être même une guerre civile aux États-Unis, si les citoyens qui possèdent environ 393 millions d’armes dans leurs maisons apprenaient que des intérêts privés sont en charge de l’armée. Cela soulèverait également une question très simple, mais dramatique : « Quel est exactement le but de la démocratie ? » Ces armes domestiques sont les barrières de titane qui protègent la population d’un Big Brother totalitaire.

Il faut se rendre compte à quel point l’armée US et les agences d’espionnage se donnent du mal pour créer des opérations sous faux-drapeau (false flags) depuis plus d’un siècle, de sorte que leurs interventions semblent toujours justes, au nom de la promotion de la démocratie, des droits humains et de la justice sur la planète. Ils ont fait sauter le navire Maine en 1898 pour entrer dans la guerre hispano-étasunienne, puis le Lusitania en 1915 pour entrer dans la Première guerre mondiale. Ils ont poussé le Japon à attaquer Pearl Harbor en 1941, étaient au courant de l’attaque 10 jours à l’avance et n’ont rien dit à la base hawaïenne. Ils ont inventé une agression de torpilles nord-vietnamiennes contre leurs navires dans la baie du Tonkin pour justifier l’envoi de soldats sur le sol vietnamien. Ils ont inventé une histoire de soldats irakiens détruisant des pouponnières pour envahir le Koweït en 1991. Ils ont inventé des armes de destruction massive pour attaquer de nouveau l’Irak en 2003 et ont organisé l’opération du 11 septembre 2001 pour déchirer la Constitution de 1789, attaquer l’Afghanistan et lancer une guerre interminable contre le terrorisme. Ce masque de vertu totalement factice doit être préservé pour contrôler l’opinion des citoyens US et leur arsenal domestique, qui doivent croire qu’ils portent les chapeaux blancs des cowboys de la démocratie.
 

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Or, comment Trump a-t-il réagi quand il a appris que les troupes US revenaient en Syrie ? Il a répété encore et encore dans chaque interview et déclaration que « nous avons sécurisé les champs pétroliers de Syrie », et a même ajouté « je pense envoyer Exxon dans la région pour s’occuper du pétrole syrien.» Les néoconservateurs, les sionistes et les banques étaient ravis, mais le reste du monde est outré, car la grande majorité ne comprend pas que Trump avale cette pilule uniquement pour ses effets secondaires. Sur le flacon est écrit en petits caractères que « l’utilisation de cette drogue pourrait forcer les troupes US-OTAN à quitter la Syrie sous la pression de la communauté mondiale unie et de la population US ahurie ». Trump a rendu la situation insoutenable pour l’OTAN de rester en Syrie, et la façon dont il a répété cette position profondément choquante et politiquement incorrecte dévoile clairement sa véritable intention. Il a détruit plus d’un siècle de fausses vertus en une seule phrase.

Trump est une anomalie historique

Trump n’est que le quatrième président dans l’histoire des États-Unis à se battre pour le peuple, contrairement aux 41 autres qui ont principalement canalisé l’argent du peuple dans un pipeline de dollars aboutissant dans des banques privées. Il y a d’abord eu Andrew Jackson qui fut tiré à bout pourtant après avoir détruit la Second Bank des États-Unis, qu’il accusait ouvertement d’être contrôlée par les Rothschild et la City de Londres. Puis, Abraham Lincoln fut assassiné après avoir imprimé ses « greenbacks » (billets verts), monnaie nationale que l’État a émise pour payer les soldats parce que Lincoln refusait d’emprunter des Rothschild à 24% d’intérêt. Ensuite, il y a eu JFK, qui a été tué pour une douzaine de raisons qui allaient toutes à l’encontre des profits des banques et de l’industrie militaire, et maintenant Donald Trump qui vocifère qu’il va « rendre l’Amérique au peuple ».

Comme la plupart des hommes d’affaires, Trump déteste les banques, pour le pouvoir formidable qu’elles ont sur l’économie. Il suffit de jeter un coup d’œil au livre unique d’Henry Ford, « The International Jew », pour découvrir sa méfiance et sa haine profondes envers les banques internationales. Les entreprises de Trump ont beaucoup souffert à cause de ces institutions qui vous vendent un parapluie, pour le reprendre dès qu’il se met à pleuvoir. Le contrôle des banques privées sur la création monétaire et les taux d’intérêt, à travers chaque banque centrale de presque tous les pays, est un pouvoir permanent sur les nations, bien au-delà du cycle éphémère des politiciens. En l’an 2000, ces pillards de nations n’étaient plus qu’à quelques pas de leur rêve totalitaire planétaire, mais deux détails subsitaient : Vladimir Poutine et 393 millions d’armes US. Puis est arrivé Donald au visage orange, la dernière pièce du puzzle dont nous, le peuple, avions besoin pour mettre fin à 250 ans de l’empire des banques.

Techniques et tactiques

Au début de son mandat, Trump a naïvement tenté l’approche directe, en s’entourant de rebelles de l’establishment comme Michael Flynn et Steve Bannon, puis en aliénant chacun de ses alliés étrangers, déchirant leurs traités de libre-échange, imposant des taxes sur les importations et les insultant en pleine face lors des rencontres du G7 de 2017 et de 2018. La réaction fut forte et tout le monde s’est mis à focaliser sur l’absurdité du Russiagate, qui semblait la seule option pour arrêter l’homme sur son chemin de la destruction du mondialisme. Comme on pouvait s’y attendre, l’approche directe n’a mené nulle part ; Flynn et Bannon ont dû partir, et Trump fut emmêlé dans une poignée d’enquêtes lui faisant réaliser qu’il n’obtiendrait rien avec la transparence. Il devait trouver un moyen d’anéantir les personnes les plus dangereuses de la planète, mais en même temps, rester au pouvoir et en vie. Il fallait devenir plus malin.

C’est à ce moment que son génie a explosé sur le monde. Il a complètement changé sa stratégie et son approche, a commencé à prendre des décisions absurdes et à tweeter des déclarations scandaleuses. Aussi menaçantes et dangereuses que certains d’entre elles puissent paraitre, Trump ne les a pas verbalisées pour leur signification au premier degré, mais visait plutôt leurs effets secondaires. Et sans se soucier de ce que les gens pensaient de lui, car seuls les résultats comptent à la fin. Il a même joué au bouffon sur Twitter, avait l’air naïf, fou ou carrément idiot, peut-être dans l’espoir de faire croire qu’il ne savait pas ce qu’il faisait, et qu’il ne pouvait pas être si dangereux. Trump qui était déjà politiquement incorrect, a poussé beaucoup plus loin pour montrer l’horrible visage que les États-Unis cachent derrière leur masque.
 
Le premier test de sa nouvelle approche fut d’arrêter le danger croissant d’une attaque et d’une invasion de la Corée du Nord par l’OTAN. Trump a insulté Kim Jung-Un sur Twitter, l’a appelé Rocket Man et a menacé de nucléariser la Corée du Nord au ras du sol. Son ire s’est déchainée pendant des semaines, jusqu’à ce que tout le monde s’aperçoive que ce n’étaient pas là de bonnes raisons pour attaquer un pays. Il a paralysé l’OTAN. Trump a ensuite rencontré Rocket Man, et ils ont marché dans le parc avec la naissance d’une belle amitié, riant ensemble, tout en n’accomplissant absolument rien dans leurs négociations, car ils n’ont rien à négocier. Beaucoup parlaient du prix Nobel de la paix, parce que beaucoup ne savent pas qu’il est généralement remis pour blanchir des criminels de guerre comme Obama ou Kissinger.

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Puis ce fut le tour du Venezuela. Trump a poussé sa tactique un peu plus loin, pour s’assurer que personne ne puisse soutenir une attaque contre le pays libre. Il a mis les pires néoconservateurs disponibles sur l’affaire: Elliott Abrams, anciennement condamné pour conspiration dans l’affaire Iran-Contras dans les années ’80 et John Bolton, célèbre belliciste au premier degré. Trump a ensuite confirmé Juan Guaido comme son choix personnel pour la présidence du Venezuela; une marionnette vide si stupide qu’il ne peut même pas comprendre à quel point on l’utilise. Une fois de plus, Trump a menacé de réduire le pays en cendres, tandis que la communauté mondiale désapprouvait le manque total de subtilité et de diplomatie dans le comportement de Trump, avec pour résultat final que le Brésil et la Colombie ont reculé en déclarant qu’ils ne voulaient rien avoir à faire avec une attaque sur le Venezuela. La prescription de Trump n’a laissé que 40 pays satellites dans le monde, avec des présidents et des premiers ministres suffisamment dénués de cervelle pour soutenir timidement Guaido le bouffon. Donald a coché la case à côté du Venezuela sur sa liste, et a continué de défiler vers le bas.

Puis vinrent les deux cadeaux à Israël : Jérusalem en tant que capitale, et le plateau du Golan syrien en tant que possession confirmée. Netanyahou qui n’est pas le crayon le plus aiguisé dans le coffre a sauté de joie, et tout le monde criait que Trump était un sioniste. Le véritable résultat fut que l’ensemble du Moyen-Orient s’est uni contre Israël, que plus personne ne peut soutenir. Même leur complice historique, l’Arabie Saoudite, a dû désapprouver ouvertement cette lourde gifle à l’Islam. Les cadeaux jumeaux de Trump étaient en fait des coups de poignard dans le dos de l’État d’Israël, dont l’avenir ne semble pas très prometteur, puisque l’OTAN devra bientôt quitter la région. Case cochée à nouveau.

Alors que la réalité s’installe

Mais ce n’est pas tout ! Avec son absence de contrôle sur l’OTAN et l’armée, Trump est très limité dans ses actions. À première vue, la multiplication des sanctions économiques contre des pays comme la Russie, la Turquie, la Chine, l’Iran, le Venezuela et d’autres pays semble dure et impitoyable, mais la réalité de ces sanctions a poussé ces pays hors du système financier Swift conçu pour maintenir les pays esclaves dans l’hégémonie du dollar, et ils glissent tous entre les mains des banques internationales. Elles ont forcé la Russie, la Chine et l’Inde à créer un système alternatif de paiements commerciaux basé sur les monnaies nationales, au lieu du dollar tout-puissant. La réalité bipolaire du monde est maintenant officielle, et avec ses prochaines sanctions à venir, Trump poussera encore plus de pays hors du système Swift pour rejoindre l’autre camp, au moment où d’importantes banques commencent à tomber en Europe.

Même dans l’ouragan politique entourant Trump, il trouve encore le temps d’afficher son humour arrogant presque enfantin. Regardez sa dernière moquerie grandiose d’Hillary Clinton et de Barrack Obama, alors qu’il s’est assis avec des généraux aux traits tendus, pour prendre une photo dans une « salle de situation » alors qu’ils simulaient la surveillance de la mort de Baghdadi quelque part où il ne pouvait pas être, exactement comme ses prédécesseurs criminels l’ont fait il y a longtemps avec le faux assassinat de Ben Laden. Il a même poussé la blague jusqu’à ajouter les détails d’un chien reconnaissant le faux calife de Daesh en reniflant ses sous-vêtements. Maintenant que vous comprenez qui est vraiment Trump, vous serez également en mesure d’apprécier le spectacle, dans toute sa splendeur et sa vraie signification.

« Nous avons sécurisé les champs de pétrole de Syrie.» Avec cette courte phrase, Trump joint sa voix à celle du Général Smedley Butler qui fit vibrer le monde il y a 80 ans avec un petit livre intitulé « La Guerre est un racket.» Piller et voler du pétrole n’est certainement pas aussi vertueux que de promouvoir la démocratie et la justice. Ce qui m’étonne, ce sont ces nombreux journalistes et analystes « alternatifs », qui connaissent sur le bout des doigts tous les problèmes techniques dans l’histoire officielle du 11 septembre, ou la réalité scientifique de l’absurde réchauffement climatique anthropique, mais qui n’ont toujours aucune idée de ce que fait Trump, 3 ans après le début de son mandat, car ils ont été convaincus par les grands médias que Trump était un malade mental.

 
Pour ceux qui doutent encore du programme de Trump, croyez-vous vraiment que l’implosion évidente de l’impérialisme US sur la planète soit une coïncidence ? Croyez-vous toujours que c’est à cause de l’influence russe sur les élections de 2016 que la CIA, le FBI, tous les médias, le Congrès US, la Réserve Fédérale, le Parti Démocrate et la moitié belliciste des républicains travaillent contre lui et tentent même de le destituer ? Comme la plupart de ce qui sort des médias, la réalité est exactement le contraire de ce que l’on vous dit : Trump est peut-être l’homme le plus dévoué qui ait jamais mis les pieds dans le bureau ovale. Et certainement le plus ambitieux et politiquement incorrect. 

Conclusion

Le monde changera radicalement entre 2020 et 2024. Le deuxième et dernier mandat de Trump coïncide avec le dernier mandat de Poutine en tant que Président de la Russie. Il se peut qu’il n’y ait pas une autre coïncidence comme celle-ci avant très longtemps, et les deux savent que c’est maintenant, ou peut-être jamais. Ensemble, ils doivent mettre fin à l’OTAN, à Swift, et l’Union Européenne devrait s’effondrer. Le terrorisme et le réchauffement climatique anthropique sauteront dans le tourbillon et disparaitront avec leurs créateurs. Trump devra drainer le marais de la CIA et du Pentagone et nationaliser la Réserve Fédérale. Avec Xi et Modi, ils pourraient mettre un terme définitif de l’ingérence des banques privées dans les affaires publiques, en refusant de payer un seul sou de leurs dettes, et refonder l’économie mondiale en se tournant vers les monnaies nationales produites par les gouvernements, et les banques privées tomberont comme des dominos, sans plus de serviteurs comme Obama pour les sauver à vos frais. Après, une paix et une prospérité insupportables pourraient errer sur la planète, car nos impôts paieront pour le développement de nos pays au lieu d’acheter du matériel militaire inutile et payer des intérêts sur les prêts des banquiers qui n’avaient même pas ces fonds en premier lieu.

Si vous ne comprenez toujours pas Donald Trump après avoir lu ce qui précède, vous êtes sans espoir. Ou vous êtes peut-être Trudeau, Macron, Guaido, ou tout autre idiot utile, ignorant que le tapis sous vos pieds a déjà glissé. 
 
Sylvain Laforest.

Source
Traduit par Réseau International

mercredi, 04 décembre 2019

The Three Seas Initiative - a real geopolitical project or just the American version of Mitteleuropa

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The Three Seas Initiative - a real geopolitical project or just the American version of Mitteleuropa

 
Ex: https://www.geopolitica.ru

In the Polish scientific and geopolitical discourse there is about 100-years old tradition of the concept of distinguishing countries located in the (quite generally described) area located between the Adriatic, Baltic and Black seas, which is based on at leasttwo falsehoods and one understatement.

First of all - especially Polish politicians like to add to this project (born on the wave of the collapse of the Russian Empire and the emergence of new nationalisms in its areas) whole Centuries of supposedly natural integration processes taking place from Scandinavia to the Balkans, of course, with particular regard to the aspirations of some Polish monarchs (especially from the Jagielloniandynasty), leaders (Adam Jerzy, Prince Czartoryskiand Józef Piłsudski) and writers (Jerzy Giedroyc, Rowmund Piłsudski, Juliusz Mieroszewski). Meanwhile, only these last ones, 20thCentury activists and thinkers were true supporters, and in fact also the creators and continuators of the Polish version of the known German theory and practice of domination and exploitation of the German-Russian borderlands in the first half of the 20th Century. Any prior genesis and justification given to this idea is pure historical anachronism.

Secondly - the authorship, and thus the "natural leadership" of the project, is eagerly attributed to Poles by… falsehood. Meanwhile, there is no doubt that despite the different names - the vision of Intermarium, the Three Seas or any other Central European Initiatives are just a repetition of the Friedrich Naumann’s (primarily economic) conception, being at most a recapitulation of the tendencies dominating in the war and industrial spheres of the German Empire. Similarly, today it is easier for Poles to refer to Marshal Piłsudski and Jerzy Giedroyc than to confirm for example, the inspirational and efficient role of such American politicians as Zbigniew Brzezinski.

However, the understatement mentioned above remains the most important weakness of all these ideas. More precisely, the fact that no common interest could ever be pointed out in the past, unconditionally and unquestionably connecting and uniting the Central and Eastern Europe states, not only those distant from each other such as Finland and Greece, but even as seemingly close and neighbourly as Poland and ... Lithuania.

Moreover, that the only common goals for this area have so far been formulated only from the outside, from the point of view of some global power for various reasons wanting to pursue its interests in Central Europe. This was the case with imperial Germany, the Soviet Union, and now with the United States. And in this last, most current sense (in connection with the Three Seas Initiative) it is most clearly seen that this is not an integration, but ... an alienation program, intended to exclude acquired countries from other initiatives (primarily the mainstream European Union), and replace their own sovereign geopolitical visions and interests. And this is also the similarity of the American vision of the organization of Central Europe with its German, Kaiser's original (not to mention the identical purpose of both: economic exploitation. 

And of course - these are not the only barriers and limitations for Central European cooperation. It should be emphasized that often the same forces that formally support unity and integration - in fact, stimulate instincts and polarization initiatives, led by escalated ethno-nationalism to the level of chauvinism. It is enough to mention that quite recently, just 105 years ago, Central and Eastern Europe was already subject to far-reaching integration - within the framework of multi-ethnic empires - Russian, Austro-Hungarian and Turkish. And as it turned out, globalization interest (then, of course, not so called) – caused not only  awaking the state-building aspirations of historical nations (such as Poles or Czechs), but simply creating new nations, what finally led to fragmentation and permanent conflict in this part of the World (this process was also continued and intensified only 30 years ago, during the collapse of Yugoslavia and the Soviet Union).

This is how a significant part of the political borders that divide our World has been established up to this day - and even more importantly, how arose barriers in national consciousness (or according to others - sometimes how they were revealed) in extreme, even pathological forms. And this is also worth remembering that those who today urge for accelerated, political and mostly artificial integration - are often the same who once divided us.

From a purely geopolitical point of view – such a role was played in the Central European area historically by British politics and German practice - and today the by hegemonic interests of the United States in their declining, somewhat self-limiting shape.

We can see the playing of the ethnonationalist factor especially in the Baltic States and recently in Ukraine, and even in Russia, where a few years ago attempts at the "Colour Revolution" from liberal slogans smoothly switched to elements of xenophobia. So, we are dealing with an interesting paradox (in fact, however, rather apparent one).

At the same time we are witnesses of:

- disintegration activities leading to the diversification of the formally functioning European Community (from two points: from Brussels, Paris and Berlin to a Europe of Two Speeds - most of Eurozone vs. the rest and from Washington to create "an even more American Europe", i.e. the Three-Seas Initiative;

- supporting chauvinistic ethno-nationalisms in these areas, which in principle are against any real regional cooperation.

All these tactics are intertwined and complementary, which makes us understand that their real goal is neither real integration, including creation of any separate value (no matter - true or imaginary) in the form of the organization of the Intermarium area; nor the actual restoration of the national principle in World relations. So regardless of whether we want to increase the factor of cooperation and integration, or whether we recognize the priority of the national factor - the vision of the Three-Seas / Intermarium is radically contradictory with them and should be rejected.

Lecture at the conference "Академия диалога: культурные разломы и границы между Балтийским и Черным морями", Kaliningrad, November 28-29.

lundi, 02 décembre 2019

Jérôme Sainte-Marie sur le thème “Macron, le bloc bourgeois et les Gilets jaunes”

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Jérôme Sainte-Marie sur le thème “Macron, le bloc bourgeois et les Gilets jaunes”

 
Mercredi 9 janvier, aux “Mercredis de la NAR” nous recevions Jérôme Sainte-Marie sur le thème “Macron, le bloc bourgeois et les Gilets jaunes”. Diplômé de l’Institut d’Études politiques de Paris, politologue, spécialiste des études d’opinion, Jérôme SAINTE-MARIE préside la société d’études et de conseil Polling Vox.
 
Il a notamment publié « Le nouvel ordre démocratique » aux éditions du Moment en 2015. Au lendemain de l’élection présidentielle de 2017, Jérôme Sainte-Marie avait expliqué que le clivage droite-gauche s’estompait au profit d’un affrontement entre « libéralisme élitaire » et « souverainisme populaire » dont les Français avait de plus en plus nettement conscience et qui pourrait conduire à de très fortes tensions si un programme ultralibéral était appliqué.
 
Comment analyser aujourd’hui “Macron et le bloc bourgeois face à la révolte des Gilets jaunes ?”